Accéder au contenu principal

Téléphone, mail, notifications… : comment le cerveau réagit-il aux distractions numériques ?

  Par  Sibylle Turo , Université de Montpellier et Anne-Sophie Cases , Université de Montpellier Aujourd’hui, les écrans et les notifications dominent notre quotidien. Nous sommes tous familiers de ces distractions numériques qui nous tirent hors de nos pensées ou de notre activité. Entre le mail important d’un supérieur et l’appel de l’école qui oblige à partir du travail, remettant à plus tard la tâche en cours, les interruptions font partie intégrante de nos vies – et semblent destinées à s’imposer encore davantage avec la multiplication des objets connectés dans les futures « maisons intelligentes ». Cependant, elles ne sont pas sans conséquences sur notre capacité à mener à bien des tâches, sur notre confiance en nous, ou sur notre santé. Par exemple, les interruptions engendreraient une augmentation de 27 % du temps d’exécution de l’activité en cours. En tant que chercheuse en psychologie cognitive, j’étudie les coûts cognitifs de ces interruptions numériques : au

Intelligence artificielle, entre craintes et promesses : la nécessité de miser sur la formation numérique




Guillaume Broutart, Country Manager France, Teamleader


L'IA (Intelligence Artificielle), une entité bientôt consciente, douée de valeurs morales et capable de prendre des décisions stratégiques, serait-elle plus compétitive que les humains sur le marché du travail ? Cette probabilité irrite autant qu'elle fascine : l'IA ne dort pas, n'a aucune contrainte et peut calculer un volume de données impressionnant. Un avantage compétitif qui suscite autant de craintes que d'espoirs dans le monde de l'entreprise. Une des solutions pour dépasser cette ambivalence reste la démocratisation de la formation du plus grand nombre aux connaissances du numérique.

Un bouleversement majeur
Certains experts voient dans l'essor du numérique et de l'intelligence artificielle une sorte de troisième révolution majeure, qui suivrait la révolution industrielle. Et pour cause : la productivité humaine semble avoir bien des choses à envier aux machines dotées d'Intelligence Artificielle. Ces dernières n'ont pas besoin de repos, n'ont pas de vie privée ou d'aspirations personnelles et impromptues, ne tombent jamais malades, et sont de surcroît capables d'une formidable puissance de calcul. Les progrès accomplis dans l'exploitation de l'Intelligence Artificielle et du Machine Learning participent à une accélération générale des bouleversements liés au numérique. Pour se rendre compte du phénomène, rappelons qu'il fallait auparavant attendre près d'une centaine d'années pour assister à un progrès fulgurant, tandis qu'aujourd'hui, tous les quinze ans environ, une innovation bouleverse l'ordre des choses. De quoi faire craindre le pouvoir grandissant des GAFAMI*. Si l'incertitude quant à l'avenir peut justifier certaines craintes, il ne faut pourtant pas voir dans l'IA la menace du remplacement des humains, mais l'opportunité pour tous d'acquérir des connaissances sur le numérique. C'est là le meilleur moyen de contrecarrer les éventuelles pertes qui pourraient être causées par le progrès de l'IA.

Des visions divergentes dans le monde du travail
L'essor de l'IA pose une question fondamentale : comment, dans un avenir proche, les humains pourront-ils subvenir à leurs besoins et créer de la richesse ?
En entreprise, les avis sont partagés : quand certains dirigeants tirent la sonnette d'alarme, d'autres sont plus optimistes, et voient en l'IA une entité complémentaire plutôt qu'un rival de l'intelligence humaine. Dans les deux cas, il importe de se souvenir d'une notion importante : l'Intelligence Artificielle fait parfois l'objet de spéculations exagérées, et ne peut en aucun cas remplacer l'intuition et la réflexion humaines. En revanche, pour préserver l'accès à l'emploi, les entreprises ont intérêt à revoir leur vision des métiers afin qu'ils intègrent pleinement les outils numériques. Ceux-ci ont déjà profondément changé la manière dont fonctionnent les relations interpersonnelles, y compris dans le contexte professionnel, ainsi que notre façon de travailler. Ainsi, dans le secteur bancaire, l'Intelligence Artificielle d'IBM, Watson, s'intègre peu à peu comme assistant auprès des conseillers de clientèle. Elle y fournit des réponses ultra-pertinentes à des requêtes précises, et aide à déceler, grâce à l'analyse sémantique, le ton des correspondances avec le client. Des applications de Watson sont également prévues dans le milieu hospitalier, notamment dans les domaines de la cardiologie ou de l'oncologie. Pour éviter que certaines typologies d'emploi, comme les stages ou les métiers administratifs, ne soient impactées, il importe de privilégier l'accompagnement et la formation au numérique, par exemple en les rendant gratuits.

L'importance de démocratiser la connaissance autour de l'IA et de ses enjeux
Quelles que soient les évolutions qui seront engendrées par l'Intelligence Artificielle, le besoin de formation à la numérisation des structures est réel. Mieux vaut se préparer pour être plus adaptable, tant sur l'aspect économique et organisationnel que sur le volet humain et social. Le travail de formation doit être étendu au plus grand nombre, si l'on veut éviter de se retrouver dans une situation de monopole par les géants du web, mais aussi pour s'assurer que les métiers puissent se réinventer.

Nous évoluons vers un monde où les tâches monotones seront prises en charge par l'Intelligence Artificielle, laissant les humains se concentrer sur leurs compétences métier et leurs loisirs. A l'avenir, nous pourrons peut-être doter les machines de capacités plus poussées, comme celle de prendre une décision après avoir analysé différents paramètres. Néanmoins, il ne faut pas perdre de vue que l'IA est là pour assister l'humain et tenir auprès de nous un rôle de conseil, de support, et que c'est là sa vocation première. De notre capacité à garder ce cap et à démocratiser la connaissance du numérique dépendra l'impact de l'IA sur le monde du travail, de l'éducation et de la société.

*Le terme GAFAMI désigne les leaders actuels du web et de l'exploitation de l'Intelligence Artificielle : Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft et IBM.

Posts les plus consultés de ce blog

Le bipeur des années 80 plus efficace que le smartphone ?

Par André Spicer, professeur en comportement organisationnel à la Cass Business School (City University of London) : Vous vous souvenez des bipeurs ? Ces appareils étaient utilisés largement avant l'arrivée massive des téléphones portables et des SMS. Si vous aviez un bipeur, vous pouviez recevoir des messages simples, mais vous ne pouviez pas répondre. Un des rares endroits où on peut encore en trouver aujourd’hui sont les hôpitaux. Le Service National de Santé au Royaume-Uni (National Health Service) en utilise plus de 130 000. Cela représente environ 10 % du nombre total de bipeurs présents dans le monde. Une récente enquête menée au sein des hôpitaux américains a révélé que malgré la disponibilité de nombreuses solutions de rechange, les bipeurs demeurent le moyen de communication le plus couramment utilisée par les médecins américains. La fin du bipeur dans les hôpitaux britanniques ? Néanmoins, les jours du bipeur dans les hôpitaux britanniques pourraient être compté

Comment les machines succombent à la chaleur, des voitures aux ordinateurs

  La chaleur extrême peut affecter le fonctionnement des machines, et le fait que de nombreuses machines dégagent de la chaleur n’arrange pas les choses. Afif Ramdhasuma/Unsplash , CC BY-SA Par  Srinivas Garimella , Georgia Institute of Technology et Matthew T. Hughes , Massachusetts Institute of Technology (MIT) Les humains ne sont pas les seuls à devoir rester au frais, en cette fin d’été marquée par les records de chaleur . De nombreuses machines, allant des téléphones portables aux voitures et avions, en passant par les serveurs et ordinateurs des data center , perdent ainsi en efficacité et se dégradent plus rapidement en cas de chaleur extrême . Les machines génèrent de plus leur propre chaleur, ce qui augmente encore la température ambiante autour d’elles. Nous sommes chercheurs en ingénierie et nous étudions comment les dispositifs mécaniques, électriques et électroniques sont affectés par la chaleur, et s’il est possible de r

De quoi l’inclusion numérique est-elle le nom ?

Les professionnels de l'inclusion numérique ont pour leitmotiv la transmission de savoirs, de savoir-faire et de compétences en lien avec la culture numérique. Pexels , CC BY-NC Par  Matthieu Demory , Aix-Marseille Université (AMU) Dans le cadre du Conseil National de la Refondation , le gouvernement français a proposé au printemps 2023 une feuille de route pour l’inclusion numérique intitulée « France Numérique Ensemble » . Ce programme, structuré autour de 15 engagements se veut opérationnel jusqu’en 2027. Il conduit les acteurs de terrain de l’inclusion numérique, notamment les Hubs territoriaux pour un numérique inclusif (les structures intermédiaires ayant pour objectif la mise en relation de l’État avec les structures locales), à se rapprocher des préfectures, des conseils départementaux et régionaux, afin de mettre en place des feuilles de route territoriales. Ces documents permettront d’organiser une gouvernance locale et dé

Ce que les enfants comprennent du monde numérique

  Par  Cédric Fluckiger , Université de Lille et Isabelle Vandevelde , Université de Lille Depuis la rentrée 2016 , il est prévu que l’école primaire et le collège assurent un enseignement de l’informatique. Cela peut sembler paradoxal : tous les enfants ne sont-ils pas déjà confrontés à des outils numériques, dans leurs loisirs, des jeux vidéos aux tablettes, et, dans une moindre mesure, dans leur vie d’élève, depuis le développement des tableaux numériques interactifs et espaces numériques de travail ? Le paradoxe n’est en réalité qu’apparent. Si perdure l’image de « natifs numériques », nés dans un monde connecté et donc particulièrement à l’aise avec ces technologies, les chercheurs ont montré depuis longtemps que le simple usage d’outils informatisés n’entraîne pas nécessairement une compréhension de ce qui se passe derrière l’écran. Cela est d’autant plus vrai que l’évolution des outils numériques, rendant leur utilisation intuitive, a conduit à masquer les processus in

Midi-Pyrénées l’eldorado des start-up

Le mouvement était diffus, parfois désorganisé, en tout cas en ordre dispersé et avec une visibilité et une lisibilité insuffisantes. Nombreux sont ceux pourtant qui, depuis plusieurs années maintenant, ont pressenti le développement d’une économie numérique innovante et ambitieuse dans la région. Mais cette année 2014 pourrait bien être la bonne et consacrer Toulouse et sa région comme un eldorado pour les start-up. S’il fallait une preuve de ce décollage, deux actualités récentes viennent de l’apporter. La première est l’arrivée à la tête du conseil de surveillance de la start-up toulousaine Sigfox , spécialisée dans le secteur en plein boom de l’internet des objets, d’Anne Lauvergeon, l’ancien sherpa du Président Mitterrand. Que l’ex-patronne du géant Areva qui aurait pu prétendre à la direction de grandes entreprises bien installées, choisisse de soutenir l’entreprise prometteuse de Ludovic Le Moan , en dit long sur le changement d’état d’esprit des élites économiques du pay

La fin du VHS

La bonne vieille cassette VHS vient de fêter ses 30 ans le mois dernier. Certes, il y avait bien eu des enregistreurs audiovisuels avant septembre 1976, mais c’est en lançant le massif HR-3300 que JVC remporta la bataille des formats face au Betamax de Sony, pourtant de meilleure qualité. Ironie du sort, les deux géants de l’électronique se retrouvent encore aujourd’hui face à face pour déterminer le format qui doit succéder au DVD (lire encadré). Chassée par les DVD ou cantonnée au mieux à une petite étagère dans les vidéoclubs depuis déjà quatre ans, la cassette a vu sa mort programmée par les studios hollywoodiens qui ont décidé d’arrêter de commercialiser leurs films sur ce support fin 2006. Restait un atout à la cassette VHS: l’enregistrement des programmes télé chez soi. Las, l’apparition des lecteurs-enregistreurs de DVD et, surtout, ceux dotés d’un disque dur, ont sonné le glas de la cassette VHS, encombrante et offrant une piètre qualité à l’heure de la TNT et des écrans pl