Accéder au contenu principal

Approches, acteurs, enjeux, secrets, guerre hybride : plongée au coeur des services de renseignement dans le monde

On leur devait déjà le remarquable « Opération d’influences chinoises : un moment machiavélien » (Ed. Les Equateurs) qui, en septembre 2021, détaillait minutieusement comment la Chine entendait « vaincre sans combattre, en façonnant un environnement favorable » à ses intérêts, en enrôlant, entre autres, des personnalités de premier plan en France. Aujourd’hui le duo formé par Paul Charon, directeur du domaine Renseignement, anticipation et stratégies d’influence de l’Institut de recherche stratégique de l’école minimaire (IRSEM) et Jean-Baptiste Jeangène-Vilmer, docteur en science politique et en philosophie, ancien directeur de l’IRSEM et aujourd’hui ambassadeur de France au Vanuatu, publient aux Presses universitaires de France (PUF) un colossal « Les mondes du renseignement. Approches, acteurs, enjeux. ». Cette somme de 584 pages constitue une véritable encyclopédie sur le renseignement et une mine d’informations pour comprendre le rôle crucial qu’il a aujourd’hui dans un monde mul

Smart Agriculture : intelligente, collaborative et durable

smartagriculture



ericdosquet
Avis d’expert par Eric Dosquet, Chief Innovation Officer d'Avanade

Tout le long du XX siècle, l’agriculture s’est transformée pour nourrir une population mondiale toujours plus nombreuse. Aujourd’hui centrée sur le défi essentiel, celui de nourrir 9 milliards de terriens d’ici 2050, c’est tout le système avec son environnement, ses outils et ses pratiques, qui vit une révolution. Certes, il s’agit de produire plus, mais surtout produire mieux et avec moins. Comment ? En passant du tracteur à l’Internet des Objets, au big data, à l’intelligence artificielle et autres pratiques innovantes pour devenir un écosystème « smart » : intelligent, collaboratif et durable.

Contrairement aux idée reçues, l’agriculture est une des filières les plus ouvertes à la technologie. La Smart Agriculture est un ensemble d’outils, de concepts et de pratiques qui favorisent une croissance économique des exploitations - coopératives agricoles et leur compétitivité, le tout dans le respect des ressources environnementales et des hommes. Face à une agriculture conventionnelle controversée et centralisée, cette nouvelle agriculture accompagne la mutation de la société aussi bien dans ses valeurs de partage, de collaboration, de durabilité, que dans ses outils, numériques et connectés. Deux branches d’innovation peuvent être distinguées : des innovations physiques (robots, drones, capteurs, M2M, Internet des objets) et des innovations numériques (logiciels de gestion, plateformes collaboratives). Complémentaires et interdépendantes, ces innovations prennent en charge différents aspects du travail agricole : le travail des sols, la gestion, la mise en marché, le matériel agricole, la mutualisation des investissements, etc.

Cependant, comme dans d’autres secteurs économiques, la plus grande innovation et le principal outil de l’agriculteur moderne sera la donnée, la meilleure méthode – la collaboration peer-to-peer. Faisons un point sur ces deux grandes tendances de la filière agricole.

La fertilité des terres passera aussi par la donnée

Il ne fait plus de doute que la bonne graine qui donnera la meilleure récolte de demain est la donnée. IBM Research estime à 90% la part des pertes de récolte dues à la météo : en alliant les modèles de prédictions météo aux techniques d’agriculture de précision, ces dégâts pourraient être réduits de 25%. L’agriculteur n’a donc pas d’autre choix que de devenir également dataculteur : il sèmera, cultivera et récoltera le biologique et le numérique.

Pour répondre à la demande croissante de la filière et démocratiser l’accès à l’innovation, de nombreuses solutions sont proposées par des acteurs technologiques. Des capteurs et objets connectés (puces intelligentes, implants, etc.) s’adaptent à une infinité de tâches quelle que soit la branche : limiter l’utilisation de pesticides dans les champs, les vignes et les vergers, surveiller l’activité des troupeaux et même des abeilles. Ainsi, les balances connectées conçues par la start-up Label Abeille se placent sous les ruches. Elles envoient des informations sous forme de tableau de bord en ligne permettant d’analyser les données à distance et ainsi effectuer un contrôle non-intrusif de la ruche.

Une des innovations les plus pointues participant à l’essor de la Smart Agriculture est l’utilisation des drones comme outil de récupération de données et d’aide à la décision. Précis, peu coûteux et polyvalent, le drone permet une meilleure connaissance des champs et de leur état en temps réel. Couplé aux données de prévisions météorologiques et d’épidémies de nuisibles, le drone permet d’optimiser l’utilisation de l’eau, réduire l’apport des pesticides, préserver la qualité du sol et optimiser le rendement. C’est ce que propose, par exemple, la start-up parisienne M-Cador avec son offre centrée sur l’analyse des données et des images pour en retirer l’information essentielle qui permettra de délivrer une réponse anticipée et précise, c’est-à-dire efficace, durable et peu onéreuse. Certes, l’aperçu aérien en temps réel reste l’élément le plus impressionnant des drones, mais c’est le service complet permettant d’analyser les données et d’en tirer des enseignements critiques qui constitue la véritable valeur ajoutée de ces drones aériens ou terrestres.

Collectées et transmises ensuite dans le Cloud, les données sur la température, hygrométrie de l’air et du sol, nombre de pieds au calibre, enherbement ou l’état sanitaire alimentent des logiciels de gestion agricole. Ces outils analytiques qui feront parler les données sont bel et bien au cœur de l’innovation digitale. Support nécessaire favorisant l’aide à la décision, ils permettent aux agriculteurs de gérer leurs machines à distance, mais surtout de moduler le travail sur la base de données fiables et en temps réel. À ce titre, la solution Fieldview développée par The Climate Corporation, fournit des données agronomes et météorologiques au niveau des parcelles agricoles afin de faciliter la prise de décision. L’agriculteur remplit un certain nombre de données concernant sa parcelle : superficie des champs, type de récolte, etc. Avec un accès mobile, le logiciel est consultable partout en temps réel. Les agriculteurs ont alors à disposition des données actuelles et futures concernant les conditions de leurs exploitations. Les décisions opérationnelles peuvent donc être prises à tout moment, en fonction des changements indiqués. L’agriculteur n’est alors plus un technicien du biologique et du chimique mais un travailleur augmenté, non plus isolé dans un champ mais au centre d’un monde numérique, le sien et celui de son écosystème.

Nouvelles pratiques collaboratives pour une meilleure rentabilité

Comme tout nouveau paradigme, la Smart Agriculture s’organise en réseaux, souvent de nature digitale. En complément des nouvelles pratiques agricoles, des plateformes collaboratives commencent à émerger avec comme maîtres mots « échange » et « communauté ». C’est l’occasion pour les agriculteurs d’améliorer la performance économique de leur exploitation agricole. Ainsi, Mimosa, première plateforme de financement participatif, est exclusivement dédiée à l’agriculture et à l‘alimentation. Dans une logique de co-farming, Wefarmup.com connecte les agriculteurs selon leur proximité géographique pour faciliter l’échange et la mutualisation de matériel agricole. L’algorithme de comparateuragricole.com leur permet de vendre leur production au meilleur prix, tandis que La Ruche qui dit Oui supprime les intermédiaires et favorise la consommation locale.

Les nouvelles pratiques du numérique dans l’agriculture vont devenir courantes dans cinq ans, il faudra attendre de 15 à 20 ans pour voir leur adoption se généraliser. A quoi ressembleront les agriculteurs de demain, ces 0,1% de la population travailleront-ils encore (et toujours) la terre ? Ces hommes et ces femmes s’appelleront toujours fermiers et agriculteurs, héritiers et passeurs d’une tradition fondatrice du néolithique, même si presque tout le travail physique lié aux semailles, au contrôle antiparasitaire et à la récolte, sera effectué par des robots, monitorés par une multitude de capteurs, et ce sous le soleil brûlant et même sous la pluie. Leur travail consistera à superviser et coordonner ces nouveaux employés, mais surtout « sentir » et « communiquer » avec la terre ou anticiper quel produit suscite(ra) le plus d’envie chez ses consommateurs. L’avenir de l’agriculture n’est plus dans le « travailler dur », mais dans « travailler smart ».

Posts les plus consultés de ce blog

Le bipeur des années 80 plus efficace que le smartphone ?

Par André Spicer, professeur en comportement organisationnel à la Cass Business School (City University of London) : Vous vous souvenez des bipeurs ? Ces appareils étaient utilisés largement avant l'arrivée massive des téléphones portables et des SMS. Si vous aviez un bipeur, vous pouviez recevoir des messages simples, mais vous ne pouviez pas répondre. Un des rares endroits où on peut encore en trouver aujourd’hui sont les hôpitaux. Le Service National de Santé au Royaume-Uni (National Health Service) en utilise plus de 130 000. Cela représente environ 10 % du nombre total de bipeurs présents dans le monde. Une récente enquête menée au sein des hôpitaux américains a révélé que malgré la disponibilité de nombreuses solutions de rechange, les bipeurs demeurent le moyen de communication le plus couramment utilisée par les médecins américains. La fin du bipeur dans les hôpitaux britanniques ? Néanmoins, les jours du bipeur dans les hôpitaux britanniques pourraient être compté

Comment les machines succombent à la chaleur, des voitures aux ordinateurs

  La chaleur extrême peut affecter le fonctionnement des machines, et le fait que de nombreuses machines dégagent de la chaleur n’arrange pas les choses. Afif Ramdhasuma/Unsplash , CC BY-SA Par  Srinivas Garimella , Georgia Institute of Technology et Matthew T. Hughes , Massachusetts Institute of Technology (MIT) Les humains ne sont pas les seuls à devoir rester au frais, en cette fin d’été marquée par les records de chaleur . De nombreuses machines, allant des téléphones portables aux voitures et avions, en passant par les serveurs et ordinateurs des data center , perdent ainsi en efficacité et se dégradent plus rapidement en cas de chaleur extrême . Les machines génèrent de plus leur propre chaleur, ce qui augmente encore la température ambiante autour d’elles. Nous sommes chercheurs en ingénierie et nous étudions comment les dispositifs mécaniques, électriques et électroniques sont affectés par la chaleur, et s’il est possible de r

Midi-Pyrénées l’eldorado des start-up

Le mouvement était diffus, parfois désorganisé, en tout cas en ordre dispersé et avec une visibilité et une lisibilité insuffisantes. Nombreux sont ceux pourtant qui, depuis plusieurs années maintenant, ont pressenti le développement d’une économie numérique innovante et ambitieuse dans la région. Mais cette année 2014 pourrait bien être la bonne et consacrer Toulouse et sa région comme un eldorado pour les start-up. S’il fallait une preuve de ce décollage, deux actualités récentes viennent de l’apporter. La première est l’arrivée à la tête du conseil de surveillance de la start-up toulousaine Sigfox , spécialisée dans le secteur en plein boom de l’internet des objets, d’Anne Lauvergeon, l’ancien sherpa du Président Mitterrand. Que l’ex-patronne du géant Areva qui aurait pu prétendre à la direction de grandes entreprises bien installées, choisisse de soutenir l’entreprise prometteuse de Ludovic Le Moan , en dit long sur le changement d’état d’esprit des élites économiques du pay

La fin du VHS

La bonne vieille cassette VHS vient de fêter ses 30 ans le mois dernier. Certes, il y avait bien eu des enregistreurs audiovisuels avant septembre 1976, mais c’est en lançant le massif HR-3300 que JVC remporta la bataille des formats face au Betamax de Sony, pourtant de meilleure qualité. Ironie du sort, les deux géants de l’électronique se retrouvent encore aujourd’hui face à face pour déterminer le format qui doit succéder au DVD (lire encadré). Chassée par les DVD ou cantonnée au mieux à une petite étagère dans les vidéoclubs depuis déjà quatre ans, la cassette a vu sa mort programmée par les studios hollywoodiens qui ont décidé d’arrêter de commercialiser leurs films sur ce support fin 2006. Restait un atout à la cassette VHS: l’enregistrement des programmes télé chez soi. Las, l’apparition des lecteurs-enregistreurs de DVD et, surtout, ceux dotés d’un disque dur, ont sonné le glas de la cassette VHS, encombrante et offrant une piètre qualité à l’heure de la TNT et des écrans pl

Ce que les enfants comprennent du monde numérique

  Par  Cédric Fluckiger , Université de Lille et Isabelle Vandevelde , Université de Lille Depuis la rentrée 2016 , il est prévu que l’école primaire et le collège assurent un enseignement de l’informatique. Cela peut sembler paradoxal : tous les enfants ne sont-ils pas déjà confrontés à des outils numériques, dans leurs loisirs, des jeux vidéos aux tablettes, et, dans une moindre mesure, dans leur vie d’élève, depuis le développement des tableaux numériques interactifs et espaces numériques de travail ? Le paradoxe n’est en réalité qu’apparent. Si perdure l’image de « natifs numériques », nés dans un monde connecté et donc particulièrement à l’aise avec ces technologies, les chercheurs ont montré depuis longtemps que le simple usage d’outils informatisés n’entraîne pas nécessairement une compréhension de ce qui se passe derrière l’écran. Cela est d’autant plus vrai que l’évolution des outils numériques, rendant leur utilisation intuitive, a conduit à masquer les processus in

De quoi l’inclusion numérique est-elle le nom ?

Les professionnels de l'inclusion numérique ont pour leitmotiv la transmission de savoirs, de savoir-faire et de compétences en lien avec la culture numérique. Pexels , CC BY-NC Par  Matthieu Demory , Aix-Marseille Université (AMU) Dans le cadre du Conseil National de la Refondation , le gouvernement français a proposé au printemps 2023 une feuille de route pour l’inclusion numérique intitulée « France Numérique Ensemble » . Ce programme, structuré autour de 15 engagements se veut opérationnel jusqu’en 2027. Il conduit les acteurs de terrain de l’inclusion numérique, notamment les Hubs territoriaux pour un numérique inclusif (les structures intermédiaires ayant pour objectif la mise en relation de l’État avec les structures locales), à se rapprocher des préfectures, des conseils départementaux et régionaux, afin de mettre en place des feuilles de route territoriales. Ces documents permettront d’organiser une gouvernance locale et dé