Par Sibylle Turo , Université de Montpellier et Anne-Sophie Cases , Université de Montpellier Aujourd’hui, les écrans et les notifications dominent notre quotidien. Nous sommes tous familiers de ces distractions numériques qui nous tirent hors de nos pensées ou de notre activité. Entre le mail important d’un supérieur et l’appel de l’école qui oblige à partir du travail, remettant à plus tard la tâche en cours, les interruptions font partie intégrante de nos vies – et semblent destinées à s’imposer encore davantage avec la multiplication des objets connectés dans les futures « maisons intelligentes ». Cependant, elles ne sont pas sans conséquences sur notre capacité à mener à bien des tâches, sur notre confiance en nous, ou sur notre santé. Par exemple, les interruptions engendreraient une augmentation de 27 % du temps d’exécution de l’activité en cours. En tant que chercheuse en psychologie cognitive, j’étudie les coûts cognitifs de ces interruptions numériques : au
Peut-on faire un jeu vidéo bâti sur la souffrance physique, morale et sociale des personnes qui vivent dans la rue ? Pour la société allemande Farbflut Entertainment, basée à Hambourg, la réponse est clairement oui. Après avoir lancé « Clodogame » (le jeu du clochard) Outre-Rhin en 2008 et comptabilisé depuis quelque 2,2 millions de joueurs pour 3 milliards de pages internet vues par mois, elle vient d'ouvrir une version française.
Le joueur doit multiplier les « stratégies » pour survivre dans la rue parisienne et devenir « châtelain » à Versailles : attraper un animal pour organiser des combats, créer sa bande pour attaquer des sans-logis et contrôler un arrondissement, jouer d'un instrument dans le métro, partir mendier, etc. Au pays des droits de l'Homme, de l'abbé Pierre et des Don Quichotte, autant dire que ce jeu exploitant tous les clichés passe mal.
« Il ne s'agit aucunement de se moquer de ces personnes. On est plutôt dans le pur deuxième degré, sans méchanceté. On donne de la visibilité à un problème de société », explique benoîtement à nos confrères de 01net Jean-Baptiste Bertrand, porte-parole de l'éditeur en France, qui promet que si le jeu, gratuit et financé par la publicité, trouve son public, il reversera une partie des bénéfices, comme en Allemagne, à des associations caritatives. Clodogame.fr pourrait ne pas en avoir l'opportunité.
Après le tollé et les réactions négatives des associations, Benoist Apparu, secrétaire d'État au Logement, a vivement condamné « les créateurs de jeux qui utilisent la souffrance humaine pour se faire un coup de pub » et demandé à ses services juridiques « d'étudier les différentes possibilités d'intervention contre ce jeu en ligne. » Reste qu'une interdiction de Clodogame paraît difficile, le jeu ne contrevenant à aucune loi.