Par Kathleen Desveaud , Kedge Business School L’intelligence artificielle promet un soulagement face à l’ennui des tâches répétitives au travail, mais son usage excessif pourrait entraîner une déqualification progressive et une nouvelle forme de frustration professionnelle. Entre automatisation bénéfique et risque de « travail zombie », comment faire de l’IA un allié du développement des compétences plutôt qu’une source d’appauvrissement cognitif ? L’impact de l’intelligence artificielle (IA) sur les métiers est un sujet majeur , qui a été traité dans de nombreuses études . Si la question de la disparition des emplois retient souvent l’attention, une autre question de fond mérite d’être considérée : comment ces technologies transforment et transformeront-elles concrètement le quotidien, les compétences et la motivation des travailleurs ? L’IA, un remède contre l’ennui au travail ? L’IA est parfois présentée comme un parfait remède a...
Par Loïc Winckelmans, fondateur de RETVIEWS
La capacité de l'humain à traiter des quantités massives d'information, ainsi que sa capacité à créer des structures cérébrales artificielles capables de reproduire nos raisonnements a, depuis quelques temps, ouvert le débat de la menace que représente l'intelligence artificielle sur le marché de l'emplois.
Avant de prendre position sur le caractère menaçant de ces avancées technologiques, prenons le temps de contextualiser et de définir certains éléments de réflexion.
Pas une réplique de l'intelligence humaine
Tout d'abord l'intelligence artificielle ne sera jamais, comme le suggère la science-fiction, une réplique exacte de l'intelligence humain. En effet, par construction même, les procédés d'apprentissage des machines sont construits pour apprendre à répliquer une intelligence processive, c'est à dire répéter une tâche précédemment réalisée et définie. En effet, les machines peuvent lire, conduire, regarder, calculer ou parler car elles apprennent de jeux de données dans lesquels ces activités ont déjà été réalisées. Jusqu'à preuve du contraire le raisonnement créatif, la capacité entrepreneuriale, le libre arbitre, la contradiction ou l'émotion ne sont pas assimilables par la machine.
Ensuite, précisons l'état actuel du marché de l'emplois. Le taux de chômage en France croit inébranlablement depuis plusieurs dizaines d'année. De plus, bien que la culture Française, monarchiste et révolutionnaire, se plaise à en responsabiliser nos gouvernements successifs, cette croissance est indiscutablement le résultat de facteurs structurels tels le manque de croissance économique en Europe ou l'inégalité de la formation.
Finalement, mentionnons que le taux d'emplois a pour fonction principale de contribuer au pouvoir d'achat du citoyen ainsi qu'à l'arsenal social du pays.
Source de croissance économique
Le développement actuel de l'intelligence artificielle est source de croissance économique et par conséquent de création d'emplois au sein de notre population. Bien sûr l'économie se mue, bien sûr les cycles de Kondratiev se succèdent et bien sûr les réticences au changement sous prétexte d'un équilibre passé, obsolète dans les faits mais rassurant dans les esprits, pénalisent à terme les civilisations n'embrassant pas le progrès. Nous avons en réalité que très peu de choix face à l'avènement de l'intelligence artificielle.
Ensuite, faisons l'introspection de notre système économique actuel. L'argument du Forsidme justifie depuis des dizaines d'années que des profils professionnels exécutent des tâches répétitives et processives. A tel point qu'une fois la première génération de robots développés, ces tâches soient remplaçables par ces derniers. Or, l'humain est lui-même une machine formidable, capable de créativité, d'inspiration, d'entrepreneuriat et d'émotions. Était-il vraiment nécessaire de réduire la majorité de son activité à une tâche processive et rébarbative, sous prétexte des arguments Fordistes et de la productivité. Quel échec de civilisation. Servons-nous de la révolution en cours comme catalyseur pour balayer l'idée que l'humain soit aliénable à des tâches robotisables. La prochaine économie se doit d'être une économie au sein de laquelle les intelligences humaines et artificielles excelleront chacune dans leurs domaines de prédilection.
Redéfinir les formes de notre économie
Enfin, l'essentiel de notre prise de position ne se situe pas dans l'adhésion ou non à l'intelligence artificielle mais dans l'utilisation de son potentiel pour redéfinir les formes de notre économie. Investissons de manière décomplexée dans les perspectives de croissance économique liées à l'intelligence artificielle. Assumons que les emplois remplacés étaient de toute manière inadéquate à l'humain et réinvestissons les bénéfices de la croissance dans des modèles sociaux prônant plus de créativité, de liberté, de sécurité, de formation et d'accomplissement pour le citoyen. On pense par exemple au revenu universel ou à une quelconque redistribution de la richesse créée par l'intelligence artificielle. Le modèle de redistribution reste à définir ainsi que la compétitivité d'un système publique qui capture de la valeur dans une industrie en croissance au niveau mondial. Cependant ce combat offre la perspective de renouvellement de notre modèle social qui s'essouffle grandement.
En conclusion, l'intelligence artificielle est certainement menaçante pour une série d'emplois d'aujourd'hui. Elle est aussi une composante inévitable de nos économies futures ainsi qu'une chance fantastique, de créer de la croissance et de redéfinir notre système social. L'Europe à toujours exceller technologiquement et socialement à l'échelle mondiale. Travaillons à conserver cette réussite plutôt que de nous effrayer de ses nouveaux ingrédients. La carotte est trop belle.