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Deepfake, décryptage d’une arnaque

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Câbles sous-marins : levier de souveraineté numérique et économique

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Par Sami Slim, Directeur adjoint de Telehouse France

Au cœur des télécommunications mondiales, les câbles sous-marins font transiter les flux de données d’un continent à l’autre. Toutefois, ils sont bien plus que de simples moyens de diffusion des données et font aujourd’hui l’objet de manœuvres d’influence à l’échelle mondiale. L’enjeu pour les pays : préserver leur souveraineté numérique et économique. À cette fin, le datacenter de connectivité se positionne comme l’autre infrastructure stratégique.

Les câbles sous-marins, un actif sous-estimé

Si les câbles sous-marins attirent autant de convoitises, c’est en premier lieu parce qu’ils sont l’une des clés de voûte de l’économie mondiale. En effet, plus de 95 pourcents des télécommunications mondiales passent par le câble, dont 97 pourcents du trafic Internet mondial. Sous les eaux, ce sont plus de 470 câbles sous-marins qui relient les continents et voient transiter plusieurs milliards de dollars de transactions financières quotidiennes. Sans eux, l’économie numérique et les richesses qu’elle génère s’effondrent.

Dès lors, contrôler les câbles sous-marins revient à avoir la main sur des liaisons intercontinentales au cœur de l’économie. À une telle position de puissance, les pays peuvent asseoir une totale souveraineté numérique, contrôler les données privées et publiques en transit, avec la certitude de ne dépendre d’aucune autre puissance. Outre l’assise économique et technologique qu’ils favorisent, les câbles sont également un outil pour le renseignement par exemple. D’où des jeux de pouvoir à l’échelle mondiale pour convoiter les câbles sous-marins devenus aussi stratégiques que gazoducs et oléoducs.  

Attirer les câbles sur le territoire, un enjeu stratégique

Dans un contexte où les câbles sous-marins sont un levier de souveraineté numérique et économique, une compétition se joue entre pays pour les capter et accueillir leurs stations d’atterrissement. Ce qui implique de disposer d’arguments pour convaincre les acteurs privés en charge du business du câble — les entreprises qui fabriquent, posent, détiennent les câbles et en sont les opérateurs.

Or, dans un maillage mondial d’infrastructures Internet, les câbles sous-marins ont besoin du relais des infrastructures terrestres : les datacenters de connectivité et d’hébergement, cruciaux pour exploiter les flux de données acheminés entre continents. Aussi, plus un territoire compte de datacenters et de hubs de connectivité, plus il représente une destination stratégique pour les câbles sous-marins et les entreprises qui les gèrent. Le datacenter constitue donc l’autre infrastructure de données stratégique que les pays doivent privilégier pour attirer les câbles et garder la main sur leur souveraineté numérique.

La France et ses datacenters, une destination de choix pour le câble

Dans la compétition numérique à l’échelle mondiale, la France est plutôt bien lotie en infrastructures, avec sur son sol deux hubs majeurs de l’internet mondial : Paris et Marseille respectivement 4e et 7e villes les plus connectées au monde — ce dont profite aussi l’Europe. En effet, la France compte treize stations d’atterrissement sur son territoire côtier où arrive plus d’une vingtaine de câbles sous-marins.

Le pays peut ainsi connecter ses réseaux filaires nationaux à ces câbles stratégiques et ce, parce qu’il bénéficie aussi d’un maillage dense de datacenters. Parmi eux figurent des datacenters de connectivité majeurs, regroupant des communautés numériques de plusieurs milliers de membres, et assurant des connexions de quelques millisecondes vers toutes les destinations du monde. Grâce à de telles infrastructures, les entreprises dans l’Hexagone ne dépendent pas d’acteurs de connectivité d’un pays étranger pour se connecter entre elles et à l’international — un atout en termes de souveraineté numérique et économique.

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