Accéder au contenu principal

Le bitcoin : une « valeur refuge » peut-elle être virtuelle ?

  Les fortes variations du cours du bitcoin sont-ils le signe de sa folle jeunesse ? Shutterstock Oatawa Par  Hervé Alexandre , Université Paris Dauphine – PSL Pour quelles raisons le cours de l’or et celui du bitcoin se sont-ils envolés au mois de février 2024 ? Faut-il voir dans cette concordance davantage qu’un hasard, l’un devenant après l’autre une valeur refuge prisée des particuliers et bientôt des institutionnels comme semblait l’indiquer la chroniqueuse économique de France Infos ? Avant de tenter d’apporter quelques éléments de réponse à cette question, rappelons que, de manière générale, notre monde se numérise inexorablement. À part quelques nostalgiques et autres collectionneurs, nous n’achetons plus de disque en vinyle ni de CD. Nous téléchargeons des morceaux de musique, quand nous ne les écoutons pas tout simplement en streaming . Dans ce dernier cas, moyennant le paiement d’un abonnement, nous pouvons écouter un morceau sans

Grande déconnexion d’Internet sur fond de conflit : une crainte irrationnelle

 

internet

Par Sami Slim, Directeur Général de Telehouse France

Au début du conflit en Ukraine, de nombreuses analyses ont tiré la sonnette d’alarme sur le risque d’une coupure Internet à grande échelle provoquée par un potentiel acte malveillant. Pourtant, Internet est architecturé sans aucune centralisation, ce qui lui donne une résilience intrinsèque et difficilement remise en cause. Tenter de couper ce réseau de réseaux ne fait pas sens et s’avère techniquement irréaliste.

Début mars 2022, le conflit en Ukraine, alors naissant, a éveillé la crainte d’une coupure Internet majeure, notamment parce qu’il y aurait un risque de sabotage de câbles sous-marins transatlantiques pour déconnecter les continents américain et européen. Une telle crainte ne se justifie pas compte tenu du fonctionnement même d’Internet et de ses ressorts de résilience.

La résilience intrinsèque d’Internet

Réseau de réseaux où circulent les flux d’informations, Internet repose sur un maillage mondial qui offrira toujours une voie de passage aux données, en particulier grâce au protocole Border Gateway Protocol. Ce protocole BGP automatise les calculs de route optimale pour le trafic Internet et l’aiguille selon les chemins actifs les plus proches. Entièrement automatisé, BGP n’est aux mains de personne et met à jour en 20 à 30 minutes tout au plus un nouvel itinéraire du trafic en cas de perturbation.

Autre force d’Internet : sa décentralisation. Si l’on revient à la dorsale d’Internet entre Amérique et Europe, les autoroutes sont jalonnées de plusieurs hubs de connectivité. En Europe, Paris, Marseille, Francfort, Londres, en particulier, relaient le trafic via des hubs de connexion reliés par de nombreuses routes terrestres, téléphoniques ou satellitaires. Il est irréaliste d’imaginer que les infrastructures de tous ces relais de connectivité « tombent » au même moment. Et BGP trouvera toujours une route alternative.

La preuve : en Ukraine où plusieurs grandes villes ont subi des destructions massives, Internet a tenu, et ce n’est pas le fait du seul réseau satellitaire Starlink proposé en renfort. Ce pays dispose d’une grande diversité d’opérateurs qui se partagent le marché, d’une très bonne distribution des flux d’informations notamment terrestre et mobile et de sept datacenters de connectivité sur lesquels BGP s’appuie pour aiguiller le trafic. La situation ukrainienne depuis le début du conflit démontre que la résilience d’Internet est bien plus solide qu’on ne l’imagine.

Sabotage des câbles sous-marins : aussi peu d’intérêt que de probabilité

Les liens Internet transatlantiques contribuant au bon fonctionnement de l’Internet mondial, les câbles sous-marins alimentent de nombreuses craintes d’actes de sabotage potentiels. Or, cette théorie n’a pas vraiment de fondement et ce à plusieurs titres. Tout d’abord, ces infrastructures desservent l’Internet utilisé par les populations, mais certainement pas par les armées qui ont recours à d’autres types de réseaux, notamment satellitaires. Les câbles transatlantiques n’offrent donc aucun intérêt militaire dans le cadre d’un conflit.

De plus, couper ces câbles déployés par plusieurs centaines sur des superficies gigantesques relève d’une tâche pharaonique qui nécessiterait des moyens en mer tout aussi démesurés. Sans compter qu’une telle opération est impossible à mener rapidement et discrètement et ferait immédiatement l’objet d’une réaction. Ce n’est tout simplement pas réaliste.

Si l’on imagine que seuls quelques câbles parmi les plus stratégiques sont coupés, BGP trouvera toujours une autre route pour acheminer les flux d’informations entre continents.

Même en imaginant l’improbable scénario du pire dans lequel un acteur malveillant parvient à les neutraliser tous, Internet ne tombe toujours pas, ni en Europe, ni sur le continent américain : dans un tel cas de figure, certes le trafic et interrompu entre les deux continents, mais certainement pas localement grâce à tout le maillage d’infrastructures de connectivité. Les utilisateurs auront sans doute accès à moins de contenus, moins rapidement mais les connexions et les échanges d’informations se poursuivront.

Déconnecter un pays d’Internet à titre de sanction : un autre scénario sans pertinence

Autre scénario appréhendé : celui d’un pays comme la Russie entièrement déconnecté de l’Internet mondial au titre d’une sanction telle l’exclusion du système Swift d’échange d’informations bancaires. Ce type de coupure n’offre là encore aucun intérêt, et s’avère sans commune mesure avec l’exclusion de Swift. En effet, contrairement à Swift qui est un système applicatif, Internet constitue un flux d’informations. Déconnecter un pays de l’Internet mondial revient à perturber artificiellement le protocole BGP (qui s’en sortira toujours), mais surtout, se priver de précieuses autoroutes Internet, notamment entre l’Europe et l’Asie dans le cas de figure évoqué.

Ainsi, Internet n’a décidément aucune caractéristique d’arme de guerre, mais offre toutes les garanties contre le risque d’une grande déconnexion.  

Posts les plus consultés de ce blog

Le bipeur des années 80 plus efficace que le smartphone ?

Par André Spicer, professeur en comportement organisationnel à la Cass Business School (City University of London) : Vous vous souvenez des bipeurs ? Ces appareils étaient utilisés largement avant l'arrivée massive des téléphones portables et des SMS. Si vous aviez un bipeur, vous pouviez recevoir des messages simples, mais vous ne pouviez pas répondre. Un des rares endroits où on peut encore en trouver aujourd’hui sont les hôpitaux. Le Service National de Santé au Royaume-Uni (National Health Service) en utilise plus de 130 000. Cela représente environ 10 % du nombre total de bipeurs présents dans le monde. Une récente enquête menée au sein des hôpitaux américains a révélé que malgré la disponibilité de nombreuses solutions de rechange, les bipeurs demeurent le moyen de communication le plus couramment utilisée par les médecins américains. La fin du bipeur dans les hôpitaux britanniques ? Néanmoins, les jours du bipeur dans les hôpitaux britanniques pourraient être compté

Comment les machines succombent à la chaleur, des voitures aux ordinateurs

  La chaleur extrême peut affecter le fonctionnement des machines, et le fait que de nombreuses machines dégagent de la chaleur n’arrange pas les choses. Afif Ramdhasuma/Unsplash , CC BY-SA Par  Srinivas Garimella , Georgia Institute of Technology et Matthew T. Hughes , Massachusetts Institute of Technology (MIT) Les humains ne sont pas les seuls à devoir rester au frais, en cette fin d’été marquée par les records de chaleur . De nombreuses machines, allant des téléphones portables aux voitures et avions, en passant par les serveurs et ordinateurs des data center , perdent ainsi en efficacité et se dégradent plus rapidement en cas de chaleur extrême . Les machines génèrent de plus leur propre chaleur, ce qui augmente encore la température ambiante autour d’elles. Nous sommes chercheurs en ingénierie et nous étudions comment les dispositifs mécaniques, électriques et électroniques sont affectés par la chaleur, et s’il est possible de r

De quoi l’inclusion numérique est-elle le nom ?

Les professionnels de l'inclusion numérique ont pour leitmotiv la transmission de savoirs, de savoir-faire et de compétences en lien avec la culture numérique. Pexels , CC BY-NC Par  Matthieu Demory , Aix-Marseille Université (AMU) Dans le cadre du Conseil National de la Refondation , le gouvernement français a proposé au printemps 2023 une feuille de route pour l’inclusion numérique intitulée « France Numérique Ensemble » . Ce programme, structuré autour de 15 engagements se veut opérationnel jusqu’en 2027. Il conduit les acteurs de terrain de l’inclusion numérique, notamment les Hubs territoriaux pour un numérique inclusif (les structures intermédiaires ayant pour objectif la mise en relation de l’État avec les structures locales), à se rapprocher des préfectures, des conseils départementaux et régionaux, afin de mettre en place des feuilles de route territoriales. Ces documents permettront d’organiser une gouvernance locale et dé

Midi-Pyrénées l’eldorado des start-up

Le mouvement était diffus, parfois désorganisé, en tout cas en ordre dispersé et avec une visibilité et une lisibilité insuffisantes. Nombreux sont ceux pourtant qui, depuis plusieurs années maintenant, ont pressenti le développement d’une économie numérique innovante et ambitieuse dans la région. Mais cette année 2014 pourrait bien être la bonne et consacrer Toulouse et sa région comme un eldorado pour les start-up. S’il fallait une preuve de ce décollage, deux actualités récentes viennent de l’apporter. La première est l’arrivée à la tête du conseil de surveillance de la start-up toulousaine Sigfox , spécialisée dans le secteur en plein boom de l’internet des objets, d’Anne Lauvergeon, l’ancien sherpa du Président Mitterrand. Que l’ex-patronne du géant Areva qui aurait pu prétendre à la direction de grandes entreprises bien installées, choisisse de soutenir l’entreprise prometteuse de Ludovic Le Moan , en dit long sur le changement d’état d’esprit des élites économiques du pay

La fin du VHS

La bonne vieille cassette VHS vient de fêter ses 30 ans le mois dernier. Certes, il y avait bien eu des enregistreurs audiovisuels avant septembre 1976, mais c’est en lançant le massif HR-3300 que JVC remporta la bataille des formats face au Betamax de Sony, pourtant de meilleure qualité. Ironie du sort, les deux géants de l’électronique se retrouvent encore aujourd’hui face à face pour déterminer le format qui doit succéder au DVD (lire encadré). Chassée par les DVD ou cantonnée au mieux à une petite étagère dans les vidéoclubs depuis déjà quatre ans, la cassette a vu sa mort programmée par les studios hollywoodiens qui ont décidé d’arrêter de commercialiser leurs films sur ce support fin 2006. Restait un atout à la cassette VHS: l’enregistrement des programmes télé chez soi. Las, l’apparition des lecteurs-enregistreurs de DVD et, surtout, ceux dotés d’un disque dur, ont sonné le glas de la cassette VHS, encombrante et offrant une piètre qualité à l’heure de la TNT et des écrans pl

Ce que les enfants comprennent du monde numérique

  Par  Cédric Fluckiger , Université de Lille et Isabelle Vandevelde , Université de Lille Depuis la rentrée 2016 , il est prévu que l’école primaire et le collège assurent un enseignement de l’informatique. Cela peut sembler paradoxal : tous les enfants ne sont-ils pas déjà confrontés à des outils numériques, dans leurs loisirs, des jeux vidéos aux tablettes, et, dans une moindre mesure, dans leur vie d’élève, depuis le développement des tableaux numériques interactifs et espaces numériques de travail ? Le paradoxe n’est en réalité qu’apparent. Si perdure l’image de « natifs numériques », nés dans un monde connecté et donc particulièrement à l’aise avec ces technologies, les chercheurs ont montré depuis longtemps que le simple usage d’outils informatisés n’entraîne pas nécessairement une compréhension de ce qui se passe derrière l’écran. Cela est d’autant plus vrai que l’évolution des outils numériques, rendant leur utilisation intuitive, a conduit à masquer les processus in