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Le bitcoin : une « valeur refuge » peut-elle être virtuelle ?

  Les fortes variations du cours du bitcoin sont-ils le signe de sa folle jeunesse ? Shutterstock Oatawa Par  Hervé Alexandre , Université Paris Dauphine – PSL Pour quelles raisons le cours de l’or et celui du bitcoin se sont-ils envolés au mois de février 2024 ? Faut-il voir dans cette concordance davantage qu’un hasard, l’un devenant après l’autre une valeur refuge prisée des particuliers et bientôt des institutionnels comme semblait l’indiquer la chroniqueuse économique de France Infos ? Avant de tenter d’apporter quelques éléments de réponse à cette question, rappelons que, de manière générale, notre monde se numérise inexorablement. À part quelques nostalgiques et autres collectionneurs, nous n’achetons plus de disque en vinyle ni de CD. Nous téléchargeons des morceaux de musique, quand nous ne les écoutons pas tout simplement en streaming . Dans ce dernier cas, moyennant le paiement d’un abonnement, nous pouvons écouter un morceau sans

Télétravail : trois ans après le premier confinement, quelles tendances perdurent ?

La plupart des collaborateurs d'une entreprise considèrent qu’elles sont clairement plus efficaces en télétravail. Vlada Karpovich/Pexels, CC BY-SA
Hélène Picard, Grenoble École de Management (GEM) et Fiona Ottaviani, Grenoble École de Management (GEM)

L’épisode de télétravail subi au printemps 2020 a depuis laissé des traces indéniables dans les vécus mais aussi dans les attentes des salariés. Des recherches récentes ont clairement établi que ces transformations impactent et bénéficient de façon très différenciée aux salariés sur différents plans, mettant notamment en évidence des inégalités très fortes entre femmes et hommes : la santé mentale et bien-être, la répartition du travail domestique et de la charge mentale, l’emploi, le temps de travail ou encore le revenu. Elles font aussi ressortir des inégalités de nature plus socioéconomiques.

À partir d’une étude des vécus des salariés pendant la pandémie et depuis, nous interrogeons les liens entre expériences du travail et espaces de vie. Comment capturer la diversité des situations et leurs effets vécus ? Comment les employeurs peuvent-ils prendre en compte la façon dont les conditions de vie des salariés, tant au plan de leur situation personnelle, sociale, économique, familiale, vont façonner leurs expériences du télétravail ?

Pour répondre à ces questions, nous avons mené une double enquête qualitative et quantitative. Le volet qualitatif est une étude de cas portant sur 52 salariés d’une institution de formation de la métropole grenobloise, interviewés sur leur vécu de la pandémie, de mars 2020 à novembre 2021. Le volet quantitatif est constitué par une double enquête menée dans la métropole grenobloise : une première s’étant déroulée en mars 2020 durant le confinement et la seconde clôturée en janvier 2023 sur le vécu du travail post-Covid. Nos résultats mettent en évidence plusieurs constats forts et notamment la pluralité des vécus du travail durant le confinement et post-confinement.

Une transformation de la relation au travail

Pour la majorité de l’échantillon, la crise sanitaire n’a pas radicalement modifié leur vécu du travail et leur vécu relationnel. En effet, c’est plutôt la satisfaction relative par rapport à son travail et ses conditions d’emploi qui s’est légèrement amoindrie. Ceux et celles qui sont les plus touchés par une dégradation de leur satisfaction dans le travail sont ceux qui vivent mal financièrement de leur travail. Ce sont aussi les femmes, les personnes en mauvaise santé ou ceux et celles qui se sentent discriminés (par rapport à leur classe, leur origine, etc.)

Cette insatisfaction relative n’est pas liée au fait de trouver son travail utile ou inutile – à ce que l’anthropologue américain David Graeber appelait les « bullshits jobs » (« jobs à la con ») – mais cela semble davantage associé à un sentiment d’injustice salariale qui nuit aux possibilités de réalisation des personnes. Elle n’est pas liée non plus de manière générale au fait d’être en télétravail ou pas, alors même que la crise sanitaire a clairement augmenté la proportion des personnes en télétravail : avant la crise seulement 36 % des personnes de la métropole grenobloise pratiquaient au moins occasionnellement le télétravail, versus 61 % aujourd’hui.

Le retour au bureau a été vécu de manière ambivalente selon les personnes. Par exemple, parmi les personnes qui rapportent un fort désir de retour (au moins partiel) au présentiel, il y a des contrastes forts entre : des managers pour qui le présentiel est un levier de contrôle, de coordination, voire de surveillance ; des personnes pour qui le besoin relationnel était fort, et le sentiment que les liens se sont dégradés du fait du tout online ; ou encore des personnes pour qui il est important d’avoir un espace de travail dédié.

En allant plus loin dans la caractérisation de ce vécu post-Covid du télétravail, l’enquête met au jour que : (1) plus de 55 % des personnes considèrent qu’elles sont clairement plus efficaces en télétravail. La majorité des personnes semblent apprécier la flexibilité des horaires, ne plus avoir à faire le trajet domicile-travail et disent réussir à bien articuler leur vie personnelle et professionnelle ; (2) toutefois, 33 % des personnes ont un domicile mal agencé pour le télétravail et 24 % aurait sans doute des améliorations à faire dans l’agencement de leur domicile pour le télétravail ; (3) seulement 16 % disposent ainsi d’un bureau dédié dans leur logement ; (4) en outre, 62 % des personnes expriment aussi des difficultés concernant le maintien de leurs liens sociaux même si elles apprécient en majorité de ne plus être dérangées par diverses sollicitations.

Ainsi, les salariés semblent avoir adopté plutôt facilement le télétravail, même si la question du lien social interroge. Sur ce point, certaines personnes expriment toutefois des besoins spécifiques en termes relationnels, qui pourraient notamment être liés à un handicap ou une neuroatypie. Cet extrait d’entretien illustre en quoi le télétravail peut alors être ressourçant :

« Ça fait longtemps que je sais que pour moi, la configuration de travail idéale, c’est de ne voir personne de ma journée. […] Les interactions sociales pour moi sont épuisantes, je suis une personnalité introvertie, je sais que quand je vois trop de monde, trop souvent, trop longtemps, je suis vidée. […] Ça a quand même joué un rôle de révélateur. »

L’impact du lieu de vie

Un point que nous relevons dans nos analyses, c’est que les personnes interviewées et leurs récits soulignent l’influence de la classe sociale et du degré de privilège socio-économique. Les salariés rencontrés peuvent parfois euphémiser en parlant de la « chance qu’ils ont », et soulignent surtout l’impact de leur lieu de vie en termes de santé mentale et de bien-être. Le fait d’avoir un jardin permet par exemple de faire du sport, de prendre soin de soi.

L’accès à la nature et à des espaces extérieurs est en outre souligné par les interviewés comme une ressource forte. On retrouve ici le phénomène du « malheur urbain » décrit par la littérature académique. Les habitants des zones peu denses sont ainsi dans l’ensemble beaucoup plus satisfaits de leur espace de vie.

Nous faisons également émerger de nos analyses un effet préjudiciable du lieu de vie sur l’activité professionnelle, qui est cette fois exprimé par les personnes qui ont des espaces de vie plus précaires, comme nous le confie une personne interrogée :

« Il y a beaucoup de distractions, il y a la télé, juste à côté. […] J’habite dans un studio maintenant et […] c’est une pièce, donc il y a la cuisine là-bas, il y a la télé, il y a mon bureau et il y a le canapé. Donc c’est très bien pour vivre, mais pas forcément […] pour travailler et vivre en même temps… ».

Le lieu de vie peut donc être un obstacle ou une ressource de l’activité professionnelle.

Notre étude met également au jour des vécus divers et des stratégies différentes pour faire face aux responsabilités familiales et à la charge relationnelle qui ont pu croître du fait des confinements, et du travail à la maison généralisé.

La majorité des enquêtés déclarent que la crise sanitaire n’a pas changé leur relation avec leur entourage. 20 % ont toutefois vu leur situation avec leurs proches se dégrader et 9 % leur situation s’améliorer. En ce qui concerne la partition des tâches domestiques et familiales, la tendance est à la persistance du même, ce qui signifie que la crise n’a pas vraiment amélioré les inégalités hommes-femmes en la matière. Ainsi, post-pandémie, les inégalités dans les répartitions des tâches du foyer demeurent, ce qui peut être un frein pour se réaliser sur d’autres plans (travail, loisirs, engagements solidaires).

L’équilibre des temps demeure donc délicat et la période post-pandémie a accru la flexibilité sans réellement répondre aux aspirations d’une partition différente entre temps de travail, temps pour les proches, pour le loisir et l’engagement, ni d’un meilleure équité hommes-femmes.

Par conséquent, dans un contexte d’inflation marquée, de quête de performance accrue et d’hyper flexibilité, le vécu du travail post-pandémie remet sur la table la question de la responsabilité de l’employeur sur le plan de la qualité de vie (monétaire et non monétaire) de ses employés.

Avec un recours démocratisé au télétravail, le bureau vient se loger à la maison et le partage déjà flou entre espace de vie et espace de travail est remis au cœur des débats. Plutôt que de tracer une limite étanche entre la sphère professionnelle et la sphère personnelle, notre recherche suggère donc la nécessité pour les entreprises de développer une approche plus transversale de la question du bien-être et du traitement des inégalités, et d’identifier de nouveaux leviers d’action.The Conversation

Hélène Picard, Professeure Assistante au département Homme, Organisations et Société. Chaire Territoires en Transitions et Chaire UNESCO pour une Culture de Paix Economique, Grenoble École de Management (GEM) et Fiona Ottaviani, Associate professor en en économie - Grenoble Ecole de Management, F-38000 Grenoble, France - coordinatrice recherche Chaire Unesco pour une culture de paix économique - co-titulaire Chaire Territoires en Transition, Grenoble École de Management (GEM)

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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