À Mayotte, François Bayrou déclenche une polémique sur l’usage de Starlink et provoque la colère d’Orange
La visite de François Bayrou à Mayotte, l’île dévastée par un cyclone, était très attendue. Si, en dévoilant son plan « Mayotte debout » de reconstruction en deux ans, le Premier ministre a un peu atténué la colère qu’il avait fait naître en se rendant dès sa nomination à Pau plutôt qu’en réunion de crise à Paris, il n’a toutefois pas évité de nouvelles polémiques.
Elisabeth Borne tourne le dos aux enseignants
La première a été déclenchée par sa ministre de l’Éducation nationale Elisabeth Borne, qui n’a rien trouvé de mieux à faire que tourner le dos à deux enseignants qui l’interpellaient sur l’aide annoncée qu’ils n’avaient pas vue. La séquence, ravageuse, a provoqué la colère des syndicats enseignants.
La seconde polémique, plus discrète, a été déclenchée par François Bayrou lui-même. Au moment de présenter son plan, le Premier ministre annonce « Nous allons déployer 200 Starlinks pour assurer les télécommunications en urgence », en faisant référence aux antennes de communication par satellite de la société Starlink, propriété du milliardaire américain pro-Trump Elon Musk.
Colère chez Orange
Cette annonce a déclenché la colère légitime de Laurentino Lavezzi, directeur des affaires publiques groupe Orange.
Dans un long post sur le réseau X, ce dernier déplore que François Bayrou n’ait pas eu un mot de remerciement pour ses techniciens. « En dix jours, le réseau mobile Orange est passé de 25 % de couverture de la population à 75 %. Nous ne demandons pas de médaille (quoi que, les mérites de nos collaborateurs sur place seraient dignes d’une reconnaissance officielle de la Nation). Mais tous sommes heurtés par une communication du gouvernement qui axe ses annonces sur du wifi provisoire by Starlink, pourtant bien moins couvrant et performant qu’un réseau mobile », rappelle M. Lavezzi, qui dénonce le fait « que les générateurs électriques sont dirigés en priorité vers les hot points wifi Starlink, tandis qu’on refuse des générateurs aux opérateurs… »
« Ces décisions interrogent quant à leur pertinence dans la poursuite du rétablissement des réseaux ; elles interrogent sur leur rationalité économique ; et elles laissent pantois sur le terrain de la souveraineté numérique », estime Laurentino Lavezzi.
Et pour cause. Pourquoi, en effet, recourir à Starlink, alors que des solutions existent pour pallier le rétablissement du réseau mobile classique s’il tardait à se réaliser ? L’ambassade de France au Vanuatu, partiellement détruite lors d’un séisme le 17 décembre, a par exemple eu recours à une antenne satellite d’un prototype mis au point par le français E-Sat et qui intègre une borne wifi…
Le ministre de l’Industrie veut rassurer
Le ministre de l’Industrie Marc Ferracci a rapidement réagi pour rattraper la bourde de François Bayrou. « Dès le début des opérations j’ai tenu à saluer l’investissement des techniciens mobilisés pour rétablir les réseaux électriques et de télécommunications pour reconnecter nos concitoyens et ce dans des conditions difficiles. Beaucoup a déjà été fait, grâce à l’engagement sans faille des salariés présents sur place ou dépêchés depuis d’autres départements : plus de 70 % de la population dispose d’une couverture mobile, des cartes SIM et des forfaits gratuits ont été distribués, des solutions wifi et satellites ont été proposées aux collectivités. Beaucoup reste encore à faire », estime le ministre, qui assure examiner « toutes les options pour accélérer la couverture numérique. »
On l’espère française ou a minima européenne pour que la souveraineté numérique ne soit pas qu’une parole politique en l’air, mais bien des actes concrets sur le terrain.