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Sur Internet, des adolescents confrontés de plus en plus jeunes à des images pornographiques

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Et si on apprenait à télétravailler plutôt que d’y renoncer

 

teletravail

Par René Bancarel, EFREI

C’est un tir de feux croisés qui vise le télétravail. Les critiques de certains dirigeants omettent souvent un point : le passage au télétravail a été spontané avec peu de formation ou d’accompagnement. Et si on commençait par le début…


À l’heure où certaines grandes entreprises iconiques notamment de la tech tournent le dos au télétravail, il est sans doute nécessaire d’interroger leurs motivations.

Après l’enthousiasme pour le télétravail des années qui ont suivi le confinement, le vent semble en train de tourner. Elon Musk annonçait brutalement la fin du télétravail dans ses entreprises (Tesla, Twitter), dès 2022. Jeff Bezos vient de faire de même au sein d’Amazon et des mouvements similaires, bien que moins radicaux, ont pu être observés dans d’autres grandes entreprises, telles que Disney ou Ubisoft, et Publicis pour la France, par exemple.

Si les annonces de ce type ont parfois été spectaculaires, les raisons avancées pour justifier ces renoncements ont été plus discrètes, en revanche. On a pu entendre une petite musique sur la perte de productivité, dans l’innovation notamment, sur les risques quant à l’engagement, ou sur l’allongement chez les cadres supérieurs des délais de prise de décision, sans que ces arguments ne soient réellement étayés par des études scientifiques.

Pousser à la démission

On a pu soupçonner, dans la presse, un objectif indirect, celui de réduire le nombre des salariés en poussant à la démission ceux qui n’envisageaient pas de retour en arrière quant au télétravail. Tout récemment, en novembre 2024, Elon Musk et Vivek Ramaswamy ont même ouvertement revendiqué cet objectif pour les fonctionnaires des États-Unis.

D’une manière sans doute moins objective, mais plus répandue chez les dirigeants, la tentation de réduire, sinon d’interdire le télétravail provient au moins en partie du fait qu’il ne correspond pas à la vision de l’engagement que se font certains dirigeants, encore bien souvent basé sur un présentéisme facilement observable.

Un message de défiance ?

N’en déplaise aux patrons de ces grandes entreprises, le télétravail conserve tous les avantages connus de longue date, aux yeux des employés, en termes notamment d’équilibre entre vie privée et vie professionnelle et de gain de temps. Il favorise la montée en autonomie des collaborateurs et peut être interprété comme une marque de confiance. Le retrait de cette possibilité ne manquera pas, en toute logique, de produire l’effet inverse, envoyant un message de défiance de la part de la hiérarchie.

Certains salariés ont organisé leur vie en tenant compte des possibilités de télétravail. Ils se sont installés à la campagne, loin des centres urbains, ils y ont acheté des maisons et y ont scolarisé leurs enfants, encouragés en cela par les politiques de leurs entreprises au sortir du Covid et par les édiles des communes rurales désireuses d’attirer de nouveaux habitants. Si l’objectif n’est pas de « dégraisser » les effectifs, les entreprises renonçant au télétravail risquent de perdre des collaborateurs dont elles n’avaient pourtant pas nécessairement envie de se séparer.

Il représente, enfin, un atout pour les entreprises, afin d’attirer de nouveaux talents ou fidéliser les anciens et même dans la gestion des maladies. Une tendance nouvelle voit ainsi certains collaborateurs légèrement souffrants « poser » des journées de télétravail, plutôt que de consulter un médecin pour obtenir un arrêt ou de venir au bureau au risque de contaminer leurs collègues.

Des formations marginales ou superficielles

La question n’est donc peut-être pas de s’interroger sur le maintien ou l’arrêt du télétravail, mais plutôt d’apprendre à bien télétravailler. On admet facilement que travailler s’apprend, qu’il est nécessaire non seulement d’acquérir les compétences indispensables à l’accomplissement des tâches, mais également les savoir-faire transverses relatifs à la communication interpersonnelle, aux comportements attendus, à l’organisation du travail, à l’autodiscipline, etc.

France24 2024.

Curieusement, on est parti du principe que télétravailler était une évidence pour qui savait travailler, sous-estimant les apprentissages que cela requiert. Si l’on peut comprendre que l’urgence du confinement ait pu reléguer ces considérations au second plan, dans un premier temps, il semble utile de s’y intéresser désormais. La formation des managers a bien sûr été soulignée comme étant nécessaire par la littérature scientifique, mais elle semble être restée marginale ou superficielle.

Nos travaux de recherche dans le cadre de notre thèse en sciences de gestion « Apprendre à télétravailler : une analyse multi-niveaux des processus d’apprentissage et d’autonomisation mobilisés par la déspatialisation » montrent qu’en avoir sous-estimé l’importance n’a pas empêché des apprentissages d’être faits par les acteurs, que ce soit au niveau individuel, managérial ou organisationnel. Les processus d’apprentissages et d’autonomisation n’ont en effet pas été interrompus par le confinement, bien au contraire, ni par la reprise d’un télétravail généralement pendulaire – comprendre alterné – ensuite.

Comment apprend-on à télétravailler ?

Nos données, recueillies sur une période de trois années comprenant les confinements, d’avril 2019 à janvier 2022, tendent à démontrer que le télétravail rend possible l’apprentissage et singulièrement celui de l’autonomie, autant qu’il le rend nécessaire. En effet, parce qu’il est temporairement et de manière récurrente soustrait au regard de son manager et de ses collègues, l’employé dispose de marges de manœuvre supplémentaires en termes d’organisation de son activité et de méthodes de travail. Dans le même temps, la moindre accessibilité du chef et du reste de l’équipe lui impose de réaliser les apprentissages qui lui permettront de gagner en autonomie.


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L’autonomisation, donc, est un processus permanent, théoriquement favorisé par le télétravail et qui se nourrit d’apprentissages à trois niveaux : individuel, au sein de l’équipe et avec le manager, et, enfin, au sein de l’organisation.

Sentiment d’efficacité professionnelle

Les compétences individuelles requises par le télétravail sont multiples et spécifiques à l’activité et au poste occupé, mais il est possible d’en dégager certaines communes au plus grand nombre. Parmi ces dernières, on trouvera la maitrise des outils bureautiques nécessaires aux échanges à distance, mais également l’autodiscipline, l’organisation, la recherche d’information…

Mais au-delà des compétences, les aptitudes qu’un télétravailleur doit mobiliser inclut son sentiment d’efficacité professionnelle, que Bandura définit comme la croyance qu’un individu à en ses capacités à réussir quelque chose, ici à travailler seul à son domicile, sans se laisser distraire et avec efficacité.

Distance psychologique avec le manager

Au niveau de la relation avec son manager et au sein de l’équipe, le modèle de distance dyadique développé par Napier et Ferris permet d’éclairer ce qui se joue à ce niveau. Ce que ces auteurs nomment distance fonctionnelle au sein de la « dyade manager-managé » conditionne la performance et la satisfaction de l’employé. Cette distance fonctionnelle repose sur deux piliers, la distance psychologique qui décrit la relation, la proximité de valeurs, de culture et même de centres d’intérêt entre le manager et son collaborateur et la distance structurelle, c’est-à-dire la distance physique entre eux.

C’est bien entendu cette dernière qui est agrandie en premier chef par la mise en place de modalités de télétravail. Donc, plus la distance structurelle augmente plus la dyade doit veiller à maintenir, voire à renforcer, une proximité psychologique afin de conserver une distance fonctionnelle acceptable et, partant, la performance et la satisfaction du télétravailleur. Une sensibilisation des deux membres de la dyade à cet enjeu contribuera aux apprentissages nécessaires à la réussite du télétravail.

Discours bienveillant

Enfin le troisième niveau, celui de l’organisation elle-même, de l’entreprise, concerne l’environnement dans lequel l’individu doit réaliser ses apprentissages. Cet environnement doit non seulement permettre les apprentissages, mais, dans la mesure du possible, les faciliter et les encourager. Il s’agit ici de la mise à disposition des outils adéquats, de la formation des collaborateurs à leur utilisation, mais également d’un discours bienveillant à l’égard du télétravail, d’un encouragement à l’innovation en termes de méthodes de travail et d’un soutien apporté aux managers et à leurs équipes. L’apprentissage de l’autonomie nécessite la construction d’un environnement « capacitant ».

Les motivations qui président au renoncement de certaines entreprises au télétravail peuvent trouver l’une de leurs origines dans le souci de contrôler davantage les salariés. L’importance du contrôle en semble renforcée mais celui-ci n’est peut-être qu’illusoire, les individus qui le souhaitent iront chercher ailleurs les marges de manœuvre qui leur permettront de conquérir une autonomie plus grande.

Renoncer au télétravail c’est renoncer à croire à la réussite du processus d’autonomisation. En ce sens, on peut y voir, soit un constat d’échec, qui peut sans doute s’observer ça et là, soit le reflet d’une croyance négative du dirigeant à l’égard des capacités d’apprentissage de ses collaborateurs et de son entreprise.The Conversation

René Bancarel, Docteur en Sciences de Gestion et du Management, directeur des études et enseignant à Efrei Paris Panthéon Assas Université, EFREI

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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