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Les Français s’intéressent toujours à l’information et ils préfèrent les journalistes aux algorithmes

BVA Xsight a mené pour l’ ARCOM , une enquête auprès d’un échantillon représentatif de 3 400 Français âgés de 15 ans et plus, afin de répondre aux questions suivantes : Les Français s’intéressent–ils à l’information ? Comment les Français s’informent–ils ? Quelle connaissance ont–ils des réseaux sociaux ? Quelle image ont-ils des médias et des journalistes ? Cette enquête menée du 22 novembre au 20 décembre 2023 révèle ainsi que les Français se sentent plutôt bien informés malgré une surcharge informationnelle et une exposition aux fake news qui les poussent parfois à adopter des comportements d’évitement de l’information (changer de chaîne de télévision ou de station de radio, suspension des notifications des applications…). L’expansion rapide des réseaux sociaux et des plateformes de vidéo a facilité et démultiplié l’accès direct des Français à l’information et son appropriation, même si les médias éditorialisés – au premier rang desquels la télévision et la radio – restent aujourd’

Données personnelles : de Bruxelles à Toulouse, le débat avance


Le débat sur la protection des données personnelles a pris une ampleur toute particulière cette semaine. Alors que l'on célébrait ce mercredi 12 mars les 25 ans du web, le Parlement européen a adopté, après trois années de travail, deux textes historiques, un règlement et une directive, soit le "paquet" sur la protection des données personnelles collectées sur internet. Un vote historique qui est arrivé au moment où était rendu le rapport d'enquête sur les écoutes effectuées par la NSA. Enfin, la nouvelle étude « Les Français et le numérique » réalisée par l’Inria et TNS SOFRES, montrait que 72% de nos compatriotes pensent que le numérique a des effets négatifs sur leur vie privée.

D'évidence, on peut dire que la donne a changé et que le sujet des données personnelles, de confidentiel, est devenu un sujet de débat majeur dans nos société.

C'est dans ce contexte que l'université Toulouse 1-Capitole a organisé ce vendredi 14 mars un colloque "Quelle protection des données personnelles en Europe ?" Organisé par l'université, la région Midi-Pyrénées et Airbus, en collaboration avec l'Associaton des étudiants du Master 2 Droit et Informatique et en partenariat avec, entre autres, l'institut fédératif de recherche, la faculté de droit, l'IRDEIC, le centre d'excellence Jean-Monnet, ce colloque a balayé toutes les problématiques économiques, politiques, juridiques, sociétales que recouvre ce sujet.

"Protéger les données personnelles c'est protéger les libertés fondamentales"

En introduction des débats, le professeur Céline Castets-Renard a rappelé combien "protéger les données personnelles, c'est protéger les libertés fondamentales" et a listé les questions que soulève le cadre juridique. La protection des données en Europe peut-elle pénaliser les entreprises européennes dans le marché mondial ? La lutte contre le terrorisme peut-elle tout justifier en matière de surveillance des réseaux ? Quels peuvent être les accords entre les opérateurs et les agences de renseignements ? Les Européens sont-ils protégés lorsque leurs données sont hébergées par des sociétés domiciliées hors UE ? Enfin, sous le poids de puissants lobbies, les prochaines élections européennes peuvent-elles mettre un frein aux avancées acquises ces derniers mois ?

Concilier protection et libre circulation

Pour Annie Blandin-Obernesser, professeur à Telecom Bretagne, il faut trouver "un espace de conciliation entre la protection et la libre circulation ; entre les actions assurant la sécurité publique et le droit à la protection de ses données." Pour ce faire, l'émergence d'un "habeas corpus numérique", proposé par le Parlement européen, serait une bonne chose.

Un habeas corpus, un texte fondamental donc, serait, en effet, conforme à l'idée que se font les Européens du sujet. Une approche globale, soulignée par Alba Bosh, représentante du très méconnu Contrôleur européen des données personnelles. Abordant le contexte et les méthodes d'adoption de la proposition de règlement, Sylvaine Polliot-Peruetto, professeur à l'UT1-Capitole, a mis en exergue de son côté que l'on pouvait percevoir les données personnelles comme le fil rouge de la construction européenne.

Les données personnelles : fil rouge de la construction européenne

Un fil rouge que les Etats ont bien du mal à mesurer à sa juste valeur si l'on en croit Esther Mitjans, professeur à l'université de Barcelone et ancienne directrice de l'autorité catalane de protection des données (2005-2012). "Les gouvernements ne pensent pas à la protection des données et ne respectent pas leur autorité de contrôle. Les autorités de protection de données ne sont pourtant pas là pour censurer mais pour aider", estime la spécialiste, qui assure que "le vote du Parlement européen va apporter plus de visibilité et plus de responsabilités sur les données personnelles."

Une question de dignité

Une analyse partagée par Cécile de Terwangne, professeur à l'université de Namur (Belgique), qui a décortiqué le Convention internationale 108 (que les Etats-Unis n'ont pas signée), le règlement et la directive européens. "Sur les données personnelles, tout se fait à l'insu des personnes. Il faut plus de transparence", estime-t-elle en démontrant que "la protection des données, c'est aussi une question de dignité."  D'où l'importance de "rééquilibrer les rapports entre ceux qui font du profilage et ceux qui sont profilés."

Europe-USA : mésentente cordiale ?

Le profilage, contre lequel s'est souvent élevée l'eurodéputée Françoise Castex, c'est bien l'une des caractéristiques des géants du net qui peuvent tout savoir des internautes au nom de la liberté d'entreprendre. "En dehors des données sensibles, l'utilisation des données aux USA fait partie de la liberté du commerce" confirme Me Winston Maxwell, avocat chez Hogan Lovells, l'un des plus grands cabinets actifs sur ces questions.
Me Maxwell détaille l'arsenal législatif américain, qui est bien plus important que ce que l'on pourrait imaginer. La protection des citoyens américains par rapport à l'utilisation de leurs données par le gouvernement est ainsi régie par un Privacy Act qui date de... 1974, quatre ans avant notre loi informatique et libertés en France. Pour Me Maxwell, Américains et Européens parlent du même sujet... mais avec des définition différentes.

Une différence d'approche que confirme Françoise Castex, qui souligne le poids des lobbies qui ont été à l'oeuvre durant ces trois dernières années pour infléchir la position du Parlement européen en faveur des intérêts économiques des grandes sociétés d'internet. "La construction du paquet données personnelles en Europe n'est pas technocratique mais démocratique. Les citoyens peuvent peser sur les décisions", assure l'eurodéputée, qui justifie la nécessité d'une nouvelle législation par l'explosion de l'échange des données (2% en 1995, 97% en 2013).
Françoise Castex reconnaît que les scandales des écoutes (affaires Prism, Snowden) "ont beaucoup pesé sur l'adoption du paquet."
Des affaires qui ont également interrogé outre-atlantique jusqu'à la Maison Blanche, où Barack Obama est conscient de la nécessité de faire des gestes envers ses alliés européens. "Aujourd'hui, beaucoup d'Américains veulent se rapprocher des positions européennes", confirme Me Maxwell.

25 ans après l'invention du web, une nouvelle page de l'Histoire est en train de s'écrire.

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