Accéder au contenu principal

L’IA au travail : un gain de confort qui pourrait vous coûter cher

Par  Kathleen Desveaud , Kedge Business School L’intelligence artificielle promet un soulagement face à l’ennui des tâches répétitives au travail, mais son usage excessif pourrait entraîner une déqualification progressive et une nouvelle forme de frustration professionnelle. Entre automatisation bénéfique et risque de « travail zombie », comment faire de l’IA un allié du développement des compétences plutôt qu’une source d’appauvrissement cognitif ? L’impact de l’intelligence artificielle (IA) sur les métiers est un sujet majeur , qui a été traité dans de nombreuses études . Si la question de la disparition des emplois retient souvent l’attention, une autre question de fond mérite d’être considérée : comment ces technologies transforment et transformeront-elles concrètement le quotidien, les compétences et la motivation des travailleurs ? L’IA, un remède contre l’ennui au travail ? L’IA est parfois présentée comme un parfait remède a...

Tribune libre. Les dessous du succès d'Amazon


Par Jean-Michel Franco, Directeur Marketing Produit de Talend

Permettre aux utilisateurs métier de tirer profit des technologies de gestion de l'information (gestion des données de référence - MDM, gouvernance des données ou qualité des données) n'est pas un exercice facile mais peut s'avérer très rentable.
Amazon est un exemple dans ce domaine : au fil des ans, la société a su élaborer et appliquer des pratiques d'avant-garde. J'entends par « pratiques d'avant-garde » les méthodes novatrices, orientées données imaginées par Amazon pour alimenter ses processus. Cette approche provoque de telles perturbations dans les opérations conventionnelles qu'il faut généralement des années aux concurrents d'Amazon pour adopter ces bonnes pratiques. Pour cette raison, les procédés utilisés par Amazon sont étudiés minutieusement par ses concurrents, des consultants et les leaders du marché. Les manifestations de ces pratiques sont publiques et peuvent procurer des avantages à chaque utilisateur du site Amazon.com. Autrement dit, l'expérience d'Amazon démontre qu'une stratégie de gestion de l'information imaginative peut se traduire par des résultats mesurables.
Tout d'abord, Amazon entretient une certaine proximité avec ses clients et visiteurs et la société transforme cette proximité en information exploitable de manière à personnaliser les interactions en temps réel. Dès ses débuts, le site Amazon.com a mis l'accent sur les interactions avec des « clients identifiés », et non de simples « visiteurs en ligne ». En 1999, Amazon a breveté la commande en « 1-Click ». Comme la société était en mesure d'identifier le client dès son arrivée sur le site Amazon.com (et sans aucun processus de connexion), elle a pu définir un processus de transaction transparent, sans aucune étape intermédiaire exigeant la saisie des informations de paiement et de livraison. Cette approche permet de fournir une meilleure expérience aux clients d'Amazon, mais elle garantit également des taux de conversion nettement plus élevés pour les transactions des clients qui ont adopté l'option 1-Click. Or ces transactions sont associées à un important pourcentage des ventes réalisées sur Amazon.com. En outre, la gestion de la fraude est beaucoup plus efficace avec les clients connus qu'avec les visiteurs anonymes ; en effet, les données de paiement et d'autres types de données sont confirmées à plusieurs reprises. Enfin, Amazon personnalise les interactions avec tous ses clients en affichant des recommandations et en essayant de prolonger leur visite en leur proposant des produits associés chaque fois qu'une transaction est terminée. Ces différentes activités pilotées par des données se traduisent en milliards de dollars de chiffre d'affaires pour Amazon et en relations commerciales durables par suite d'une meilleure fidélisation des clients et visiteurs.
Ensuite, Amazon sait mettre en valeur son portefeuille de produits. Amazon ne se contente pas d'appliquer des techniques très efficaces pour la mise en avant de ses produits ; la société complète les informations factuelles qu'elle associe aux produits par différents éléments à forte valeur ajoutée : commentaires des clients, produits similaires, listes d'envies des internautes, etc. Pour toutes ces raisons, les pages d'Amazon.com sont devenues au fil des ans un véritable catalogue de référence qui ne se contente pas d'aider les clients d'Amazon.com à faire des choix, mais qui décrit la plupart des biens de consommation du marché. Exemple personnel : bien que je n'achète presque jamais de musique (je suis abonné à un service de streaming), je visite régulièrement Amazon.com pour consulter des informations sur les sorties d'albums. Le catalogue d'Amazon.com s'est avéré être si puissant pour attirer les clients que les moteurs de recherche, comparateurs de prix et services de recommandation ont parfois du mal à s'insérer dans les catégories les plus efficaces d'Amazon, ce qui n'est pas le cas dans d'autres secteurs où Amazon est plus faible ou absent comme l'hôtellerie, les voyages et le tourisme (cf. TripAdvisor, e-bookings, Yelp, etc.). Pour illustrer l'impact des activités d'Amazon sur certains marchés, notez que Kelkoo, un comparateur de prix a été acquis par Yahoo! pour 475 millions en 2004, puis revendu quatre ans plus tard pour moins du quart de ce prix (100 millions ). Google lui-même s'inquiète de la concurrence croissante que représente Amazon pour son moteur de recherche. Cette situation amène à une forme de conflit : le site d'Amazon est devenu le « standard de facto » pour les informations relatives aux produits. En face, les concurrents d'Amazon ont les plus grandes peines du monde à attirer les visiteurs sur leur propre site et à éviter que les consommateurs utilisent leurs boutiques physiques uniquement pour examiner et tester les produits « en vrai » ou orienter les processus tels que la fixation des prix du marché. Le catalogue produit d'Amazon est ainsi devenu une redoutable arme concurrentielle qui lui permet de conquérir rapidement de nouveaux marchés avec des offres client innovantes. C'est ainsi que dans le cadre de son positionnement sur le marché des produits Frais, Amazon propose à ses clients l'Amazon Dash, un équipement connecté au réseau Wi-Fi de la maison permettant de constituer sa liste de course en scannant les codes barre des produits souhaités ou même en les nommant grâce à la reconnaissance vocale. Le Dash se charge ensuite de constituer la commande, de l'envoyer à Amazon, puis de la livrer.
Enfin, Amazon renforce la confiance par l'information. Ce dernier point est au cœur de la réussite de la « Marketplace » d'Amazon, et plus généralement, de son approche « longue traîne» : lorsqu'un visiteur trouve un produit sur le site Amazon.com, il très peu probable qu'il soit confronté à une rupture de stock. Mais de toute évidence, Amazon ne pourrait pas supporter seul les coûts d'un inventaire de plusieurs millions de produits, et c'est pour cette raison que la société a ouvert son catalogue à des tiers. En 2013, plus d'un milliard de produits dans le monde ont été commandés sur Amazon à des vendeurs Amazon Marketplace, et les analystes estiment que le marché Amazon Marketplace représente désormais plus d'un tiers des ventes globales d'Amazon.
Il est clair que la Marketplace apporte de la valeur aux clients, mais cette formule s'accompagne d'un défi : comment les clients peuvent-ils faire confiance à un marchand dont ils n'ont jamais entendu parler et vis-à-vis duquel ils n'ont aucune expérience en matière de fiabilité ? Cette confiance peut être établie à la lecture des évaluations du vendeur, qui sont mises en évidence sur la page du produit lorsque vous êtes sur le point d'acheter celui-ci. Chaque fois que vous achetez sur Amazon Marketplace, Amazon vous contacte pour solliciter votre évaluation du fournisseur du produit une fois que celui-ci vous a été livré. Grâce à cette importante étape du processus, Amazon poursuit le dialogue avec vous et par conséquent vous amène à penser que les évaluations précédentes du vendeur sont dignes de confiance. Là encore, l'information a un impact positif sur la réputation, les résultats et la croissance d'Amazon. A noter que ce principe de confiance est celui qui a permis à de nombreux acteurs de l'Internet de s'intercaler entre acheteurs et fournisseur d'un bien ou d'un service.  Blablacar a ainsi permis de populariser le co-voiturage, mais aussi de le rendre plus sûr au yeux du consommateur, au point désormais de représenter une alternative à d'autres moyens de transport tels que le train. Dans cette même lignée, Trip Advisor, Uber, ou Airbnb sont autant d'exemples de services basés sur ces mêmes principes de mise en relation.
Que pouvons-nous apprendre de tout cela ? Tout d'abord, cela montre toute la valeur et les bénéfices d'une gestion de l'information poussée, partageable et digne de confiance sur vos principales ressources - dans cet exemple, les clients, produits et fournisseurs - et l'intérêt qui existe à lier étroitement cette information à vos processus - dans cet exemple, les processus côté client. Ces processus pilotés par les données paraissent essentiels et incontournables et pourtant, alors qu'Amazon gère l'identité de ses clients dans l'ensemble de ses processus depuis les années 1990, la plupart des entreprises sont toujours incapables de l'imiter vingt ans plus tard, et il existe encore peu de solutions logicielles prêtes à l'emploi pour les mettre en place. Considérez par exemple la personnalisation individualisée : aujourd'hui, la plupart des entreprises gèrent leurs interactions en ligne à partir des flux de clics ou du comportement des « visiteurs inconnus », plutôt que par l'analyse des parcours complets et répétés des clients connus ou des clients sur le point d'être identifiés. Ironie du sort, comme ces acteurs savent qu'ils ne peuvent pas ignorer les visiteurs inconnus s'ils veulent disposer d'un processus marketing/vente efficace, ils s'efforcent de « découvrir ce qui est inconnu », mais avec des méthodes qui soulèvent généralement des inquiétudes en matière de confidentialité de la part de leurs clients qui se sentent suivis par ces marchands sans l'avoir demandé. Les solutions adoptées par Amazon pour exploiter l'identité de ses clients et les données collectées lors des interactions et transactions en ligne semblent constituer une approche beaucoup plus transparente et de type gagnant-gagnant.
Une question demeure : comment faire pour que ces pratiques d'avant-garde que seuls quelques pionniers ont appris à maitriser deviennent des bonnes pratiques, c'est-à-dire la meilleure façon de procéder que tout un chacun se doit d'adopter ? Si les pionniers ont pu atteindre une différenciation concurrentielle en les adoptant, ils ont pour la plupart contraint tous leur secteur d'activité à engager leur  transformation numérique.  Dans  le secteur des médias, de  l'hôtellerie, des voyages, du tourisme ou de la distribution, adopter ce type approche devient un facteur de survie : l'enjeu n'est plus le pourquoi, mais le comment. D'où le fait que ces secteurs soient parmi les premiers à adopter en masse les technologies de gestion de l'information qui permettent d'y parvenir, telles le Big Data ou le Master Data Management.

Posts les plus consultés de ce blog

Le bipeur des années 80 plus efficace que le smartphone ?

Par André Spicer, professeur en comportement organisationnel à la Cass Business School (City University of London) : Vous vous souvenez des bipeurs ? Ces appareils étaient utilisés largement avant l'arrivée massive des téléphones portables et des SMS. Si vous aviez un bipeur, vous pouviez recevoir des messages simples, mais vous ne pouviez pas répondre. Un des rares endroits où on peut encore en trouver aujourd’hui sont les hôpitaux. Le Service National de Santé au Royaume-Uni (National Health Service) en utilise plus de 130 000. Cela représente environ 10 % du nombre total de bipeurs présents dans le monde. Une récente enquête menée au sein des hôpitaux américains a révélé que malgré la disponibilité de nombreuses solutions de rechange, les bipeurs demeurent le moyen de communication le plus couramment utilisée par les médecins américains. La fin du bipeur dans les hôpitaux britanniques ? Néanmoins, les jours du bipeur dans les hôpitaux britanniques pourraient être compté...

Quelle technologie choisir pour connecter les objets ?

Par Frédéric Salles, Président et co-fondateur de Matooma   En 2021, le nombre total d'objets connectés utilisés atteindra les 25 milliards selon Gartner. Il est ainsi légitime de se demander quelles sont les technologies principales permettant de connecter les objets, et quelle pourrait être celle la plus adaptée pour sa solution. Un projet de vidéosurveillance par exemple n'aura absolument pas les mêmes besoins qu'un projet basé sur le relevé de température au milieu du désert. Ainsi pour trouver la meilleure connectivité pour son objet, de nombreuses questions peuvent se poser : mon objet fonctionne-t-il sur batterie ou est-il alimenté ? Mon objet restera-t-il statique ou sera-t-il mobile ?  Mon objet est-il susceptible d'être dans un endroit difficile d'accès ou enterré ? A quelle fréquence mes données doivent-elles remonter ? Etc. Voici les différentes solutions actuellement disponibles sur le marché. Courte distance : RFID/Bluetooth/WiFi La RFID (Ra...

La fin du VHS

La bonne vieille cassette VHS vient de fêter ses 30 ans le mois dernier. Certes, il y avait bien eu des enregistreurs audiovisuels avant septembre 1976, mais c’est en lançant le massif HR-3300 que JVC remporta la bataille des formats face au Betamax de Sony, pourtant de meilleure qualité. Ironie du sort, les deux géants de l’électronique se retrouvent encore aujourd’hui face à face pour déterminer le format qui doit succéder au DVD (lire encadré). Chassée par les DVD ou cantonnée au mieux à une petite étagère dans les vidéoclubs depuis déjà quatre ans, la cassette a vu sa mort programmée par les studios hollywoodiens qui ont décidé d’arrêter de commercialiser leurs films sur ce support fin 2006. Restait un atout à la cassette VHS: l’enregistrement des programmes télé chez soi. Las, l’apparition des lecteurs-enregistreurs de DVD et, surtout, ceux dotés d’un disque dur, ont sonné le glas de la cassette VHS, encombrante et offrant une piètre qualité à l’heure de la TNT et des écrans pl...

6 questions sur Zone-telechargement

Quel était ce site ? Zone-telechargement.com était jusqu'à lundi soir l'un des plus gros sites web français proposant de télécharger des contenus numériques illégaux. En grande majorité des films parfois très récents ; des séries télé notamment américaines qui n'étaient pas diffusées en France ; de la musique ; des logiciels et des jeux vidéo. Les séries et les films étaient disponibles en différentes qualités et ceux en langue anglaise étaient sous-titrés grâce à des communautés d'utilisateurs capables de sous-titrer des épisodes de série 24 heures après leur diffusion aux États-Unis. Le site comptabilisait, selon la gendarmerie, en moyenne 140 millions de pages vues par mois et 11 000 téléchargements par jour. La société Alexa affichait Zone-Telechargement à la 11e place des sites les plus visités de France… devant Twitter ! Zone-Telechargement proposait 18 000 films, 2 500 séries télé ; 11 000 documentaires ; 20 943 émissions télé ; plus de 150 000 MP3 mais aus...

Deepfakes, vidéos truquées, n’en croyez ni vos yeux ni vos oreilles !

Par  Divina Frau-Meigs , Auteurs historiques The Conversation France Les spécialistes en fact-checking et en éducation aux médias pensaient avoir trouvé les moyens de lutter contre les « deepfakes » , ou hypertrucages , ces manipulations de vidéos fondées sur l’intelligence artificielle, avec des outils de vérification comme Invid-Werify et le travail des compétences d’analyse d’images (littératie visuelle), avec des programmes comme Youverify.eu . Mais quelques cas récents montrent qu’une nouvelle forme de cyberattaque vient de s’ajouter à la panoplie des acteurs de la désinformation, le deepfake audio. Aux États-Unis, en janvier 2024, un robocall généré par une intelligence artificielle et prétendant être la voix de Joe Biden a touché les habitants du New Hampshire, les exhortant à ne pas voter, et ce, quelques jours avant les primaires démocrates dans cet État. Derrière l’attaque, Steve Kramer, un consultant travaillant pour un adversaire de Biden, Dean ...

D’IBM à OpenAI : 50 ans de stratégies gagnantes (et ratées) chez Microsoft

  Paul Allen et Bill Gates en 1970 à Lakeside School (Seattle). Microsoft naîtra cinq ans plus tard. Auteur inconnu/Wikimedia Par  Frédéric Fréry , ESCP Business School Insubmersible. Même la vague des Gafa n’a pas vraiment atteint Microsoft. Cinquante ans après sa création, soit une éternité dans le monde de la tech, la firme de Bill Gates et Paul Allen est toujours là et bien là. Retour sur ce qu’on appelle outre-Atlantique, une success-story avec quelques échecs. Cette semaine, Microsoft fête ses 50 ans. Cet article a été écrit sur Microsoft Word, à partir d’un ordinateur équipé de Microsoft Windows, et il sera vraisemblablement publié sur des plateformes hébergées par Microsoft Azure, notamment LinkedIn, une filiale de Microsoft qui compte plus d’un milliard d’utilisateurs. C’est dire l’influence de cette entreprise qui, en 2024, a dégagé un bénéfice net de 88 milliards de dollars po...