Par Sibylle Turo , Université de Montpellier et Anne-Sophie Cases , Université de Montpellier Aujourd’hui, les écrans et les notifications dominent notre quotidien. Nous sommes tous familiers de ces distractions numériques qui nous tirent hors de nos pensées ou de notre activité. Entre le mail important d’un supérieur et l’appel de l’école qui oblige à partir du travail, remettant à plus tard la tâche en cours, les interruptions font partie intégrante de nos vies – et semblent destinées à s’imposer encore davantage avec la multiplication des objets connectés dans les futures « maisons intelligentes ». Cependant, elles ne sont pas sans conséquences sur notre capacité à mener à bien des tâches, sur notre confiance en nous, ou sur notre santé. Par exemple, les interruptions engendreraient une augmentation de 27 % du temps d’exécution de l’activité en cours. En tant que chercheuse en psychologie cognitive, j’étudie les coûts cognitifs de ces interruptions numériques : au
Antoine Chéron, Avocat associé, www.acbm-avocats.com
Le 30 mars dernier, le Conseil Constitutionnel a rendu une décision qui, bien que passée relativement inaperçue dans les milieux juridiques, a néanmoins alerté les médias – à tort ou tout du moins de manière excessive, la portée de cette décision étant bien plus restrictive que ce qui a été annoncé.
Il s’agissait pour le Conseil Constitutionnel de contrôler la constitutionnalité de l’article 434-15-2 du Code pénal, lequel sanctionne le gardé à vue qui refuserait de livrer le code de déverrouillage de son téléphone portable.
Et les peines sont lourdes : s’il est prévu une peine de prison maximale de 3 ans et une amende 45 000 euros pour celles et ceux refusant de remettre la clé de déverrouillage si le moyen de cryptologie qui y est associé est « susceptible d’avoir été utilisé pour préparer, faciliter ou commettre un crime ou un délit », celle-ci monte à 5 ans de prison et 75 000 euros d’amende s’il est avéré que le refus de fournir ce code « aurait permis d’éviter la commission d’un crime ou d’un délit ou d’en limiter les effets ».
Le Conseil Constitutionnel a affirmé la constitutionnalité de cet article, alertant les médias qui ont mis en avant les risques pour le respect de la vie privée, et soulevant également la question très actuelle de la lecture en clair des données chiffrées.
Pour autant, il convient de rassurer, et de bien avoir à l’esprit que cet article est d’une portée limitée.
Son application est en effet soumise à trois conditions :
Tout d’abord, il est impératif de démontrer que le gardé à vue a connaissance du code de déverrouillage du téléphone portable.
Ensuite, il s’agit de prouver que le déverrouillage du téléphone présente un intérêt pour l’enquête, c’est-à-dire que le téléphone susceptible de contenir des données chiffrées liées à l’affaire et susceptible de faire avancer l’enquête.
Enfin, seule une autorité judiciaire dispose de la compétence pour ordonner au gardé à vue de livrer le code de déverrouillage. Cette injonction ne peut en aucun cas provenir d’un officier de police judiciaire.
Dès lors, le placement en garde à vue ne confère pas automatiquement et sans limite le droit aux autorités, quelles qu’elles soient, d’exiger du détenu le code de sécurité du téléphone afin d’avoir accès à l’ensemble des données qui y sont contenues.