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Téléphone, mail, notifications… : comment le cerveau réagit-il aux distractions numériques ?

  Par  Sibylle Turo , Université de Montpellier et Anne-Sophie Cases , Université de Montpellier Aujourd’hui, les écrans et les notifications dominent notre quotidien. Nous sommes tous familiers de ces distractions numériques qui nous tirent hors de nos pensées ou de notre activité. Entre le mail important d’un supérieur et l’appel de l’école qui oblige à partir du travail, remettant à plus tard la tâche en cours, les interruptions font partie intégrante de nos vies – et semblent destinées à s’imposer encore davantage avec la multiplication des objets connectés dans les futures « maisons intelligentes ». Cependant, elles ne sont pas sans conséquences sur notre capacité à mener à bien des tâches, sur notre confiance en nous, ou sur notre santé. Par exemple, les interruptions engendreraient une augmentation de 27 % du temps d’exécution de l’activité en cours. En tant que chercheuse en psychologie cognitive, j’étudie les coûts cognitifs de ces interruptions numériques : au

PlantNet, eBird, Spipoll, iNaturalist… ces applis au service de l’i-écologie

 application

L’application Pl@ntnet permet à partir d’un smartphone de reconnaître une espèce et la recenser pour contribuer à son étude. Pl@ntnet
Pierre Bonnet, Cirad et Alexis Joly, Inria

Le déclin alarmant de la biodiversité terrestre menace le bien-être futur de l’humanité, notamment par la réduction de tous les services (dit « écosystémiques ») auxquels cette biodiversité contribue.

L’amélioration des connaissances sur les pressions qui s’exercent sur le vivant – fragmentation des habitats, urbanisation croissante ou intensification agricole – a permis une large prise de conscience de la société civile, qui se mobilise désormais contre les causes du changement climatique et pour une meilleure conservation des espèces vivantes.

Le manque d’expertise taxonomique – qui désigne notre capacité à identifier les espèces – est reconnu depuis près d’une trentaine d’années comme un frein majeur à l’application de la Convention sur la diversité biologique.

C’est pourquoi de nombreuses initiatives à travers le monde expérimentent de nouvelles formes d’accès à cette connaissance taxonomique.

Certaines d’entre elles visent à répondre à la demande croissante de connaissances, tout en impliquant la société dans la caractérisation et l’étude de son environnement. Elles participent ainsi au développement de plates-formes de sciences participatives pour le suivi des oiseaux, comme eBird, des insectes pollinisateurs, comme Spipoll, ou encore de la biodiversité dans son ensemble, comme iNaturalist.

L’exemple de la plate-forme Pl@ntNet

Les plantes représentant l’une des sources majeures de notre alimentation et de la structuration des écosystèmes, quelques plates-formes se sont spécialisées dans leur identification et leur recensement.

C’est le cas de Pl@ntNet, initiée il y a plus d’une dizaine d’années, par un consortium de recherche français (Cirad, Inrae, Inria, IRD), et qui mobilise des expertises complémentaires, à la frontière entre sciences informatiques et sciences du végétal.

Présentation de l’application Pl@ntNet (Inria, 2014).

Cette plate-forme de science participative, utilisée aussi bien par le grand public que par des professionnels de la gestion et de la conservation, est aujourd’hui l’une des principales sources d’information sur les plantes au sein du système d’information mondial sur la biodiversité, le GBIF.

Elle expérimente et développe des services d’identification automatisée des plantes par l’image, qui permettent à partir d’un smartphone de rapidement reconnaître une espèce et la recenser pour contribuer à son étude.

Avec plusieurs centaines de milliers d’utilisateurs journaliers, et un nombre croissant de contributeurs depuis sa création (statistiques Pl@ntNet), elle permet aujourd’hui le recensement de plus de 43 000 espèces de plantes à l’échelle mondiale.

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Les données qu’elle génère ont été utilisées dans un grand nombre d’études différentes, que ce soit dans le suivi des espèces envahissantes, sur les biais de collecte de données issues des programmes de sciences participatives, dans des travaux en sciences informatiques, ou encore pour l’étude des espèces à plus large échelle (dont les publications sur les données publiées au Gbif).

Vers le développement d’une i-écologie

La force de ces nouvelles plates-formes naturalistes repose sur trois aspects principaux :

  • leur très grande accessibilité (applications web et mobiles gratuites, multilingues, avec authentification facultative) ;

  • leurs performances liées aux vastes corpus de données sur lesquelles elles s’appuient ainsi qu’à l’usage de l’intelligence artificielle qui contribue à rapidement identifier les espèces par des données multimédias ;

  • leur visibilité qui résulte de l’intérêt grandissant de la société civile pour ce type de démarche.

Ces plates-formes contribuent ainsi au développement d’une nouvelle approche scientifique en écologie, intitulée l’i-Ecology (i-écologie), qui permet d’apporter un soutien précieux aux approches plus conventionnelles.

Malgré les efforts d’initiatives comme eBird, Pl@ntNet et iNaturalist, ou encore des sites et projets universitaires, pour caractériser les espèces à l’échelle mondiale, reste que près de la moitié des plantes sur Terre n’ont certainement jamais été photographiées à l’état sauvage !

Présentation de l’application eBird. (Cornell Lab of Ornithology, 2018).

Mobiliser toujours plus d’observateurs

Ce constat de notre méconnaissance de la biodiversité engage à poursuivre les efforts initiés pour renforcer notre capacité à recenser toutes ces espèces qui nous entourent, plus facilement et plus rapidement. Dans cet objectif, la mise en commun des expertises et des données est indispensable pour accélérer la caractérisation de la distribution de la biodiversité.

La numérisation des collections d’histoire naturelle, à travers des initiatives telles qu’iDigBio ou e-ReColNat, constitue un pas important en ce sens. Elles doivent être complétées par des observations sur le terrain, produites en plus grand nombre, pour permettre de connaître tout le gradient visuel exprimé par les espèces. Comment sinon protéger les espèces en danger si on ne peut les reconnaître ? !

Les techniques automatiques d’identification d’espèces imaginées par Gaston et O’Neill en 2004 ont énormément progressé au cours des quinze dernières années. Elles permettent aujourd’hui d’envisager des approches intégrées au sein de dispositifs autonomes, que ce soit pour le suivi d’espaces naturels ou agricoles.

Le passage à l’échelle de ce type d’approche nécessite toutefois un nombre bien plus important d’observations et d’observateurs de terrain. C’est pourquoi, plus que jamais, les réseaux citoyens de suivi de la biodiversité doivent poursuivre leur développement en favorisant le partage de données libres, tout en répondant aux attentes d’une meilleure connaissance de notre environnement proche.

Ces technologies sont au cœur de plusieurs initiatives européennes d’ampleur en cours et à venir – on peut citer Cos4Cloud, EU-MAMBO et EU-GUARDEN –, ce qui permettra sans nul doute leur plus large exploitation dans le futur.The Conversation

Pierre Bonnet, Chercheur en Botanique et Informatique appliqué à la biodiversité, Cirad et Alexis Joly, Docteur en informatique, Inria

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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