Le Pic du Midi inaugure ses nouveaux espaces scientifiques et prolonge cent cinquante ans d’histoire astronomique
|  | 
| Le Pic du Midi © Matthieu Pinaud | 
Après quatre années de travaux menés dans des conditions extrêmes, le Pic du Midi de Bigorre a inauguré, jeudi 30 octobre 2025, deux nouvelles structures dédiées à la recherche. Financé à hauteur de 7,66 millions d’euros, ce double chantier renforce l’excellence scientifique du site et la présence de l’Université de Toulouse au sommet.
Suspendu au-dessus des nuages, le Pic du Midi de Bigorre continue d’écrire l’une des plus hautes pages de la science française. Jeudi 30 octobre 2025, ses nouveaux espaces scientifiques ont été inaugurés par Pierre-André Durand, préfet de la région Occitanie, Carole Delga, présidente de la Région, et Odile Rauzy, présidente de l’Université de Toulouse. Cette cérémonie marque l’aboutissement de quatre années de travaux menés dans des conditions extrêmes, au cœur d’un site à la fois mythique et vivant.
Lancé en 2021, le double chantier visait à renforcer la capacité d’accueil et d’expérimentation de l’Observatoire du Pic du Midi, tout en modernisant ses infrastructures techniques. Sous la maîtrise d’ouvrage de l’Université de Toulouse et avec le soutien de l’Observatoire Midi-Pyrénées (OMP), le projet a mobilisé 7,66 millions d’euros de financement. L’État a apporté 2,02 millions, dont 1,52 million issus du FNADT, et la Région Occitanie 3,5 millions, incluant 3 millions d’euros de fonds européens FEDER. Au total, la Région a consacré 7,5 millions d’euros au site, en comptant les 4 millions dédiés aux équipements scientifiques.
|  | 
| Le clos couvert de la structure "Dauzère-Soler" © Université de Toulouse | 
Le nouveau bâtiment Dauzère-Soler, extension de la structure existante, en constitue le pivot. Sur trois niveaux, il accueille une salle de pilotage centralisée pour les coupoles d’observation, une salle de travail en groupe et une trentaine de couchages destinés aux chercheurs. Sa terrasse accueille désormais une plateforme environnementale dédiée aux mesures atmosphériques, prolongeant les travaux de recherche sur le climat. Adaptée aux séminaires et à la médiation scientifique, cette extension porte une double mémoire : Camille Dauzère, responsable du site de 1920 à 1937, et Pierre Soler, directeur de l’OMP jusqu’à son décès en 2017.
Le télescope Bernard Lyot (TBL), inauguré en 1980 et pilier de l’astronomie optique française, bénéficie lui aussi d’un espace rénové. Son bâtiment a été agrandi pour accueillir une salle de ré-aluminure du miroir principal de deux mètres, une opération essentielle à la précision des observations. Le rez-de-chaussée a été libéré pour l’installation du spectropolarimètre infrarouge SPIP, livré en octobre 2025. Cet instrument de dernière génération ouvrira de nouvelles perspectives dans la recherche d’exoplanètes, un domaine d’excellence pour les équipes du Pic du Midi.
Ce chantier, conduit dans un environnement d’altitude extrême, a représenté un défi technique et humain. Les équipes ont dû composer avec des saisons de travaux limitées à quelques mois, des températures négatives, des vents violents et une logistique entièrement dépendante du téléphérique pour les personnels et de l’héliportage pour les matériaux, parfois par Super Puma. À ces contraintes s’ajoutaient la préservation des observations nocturnes et des flux touristiques, dans un site qui accueille chaque année plusieurs dizaines de milliers de visiteurs.
Pour Carole Delga et Pierre-André Durand, cette modernisation incarne la convergence des ambitions régionales, nationales et européennes. « Grâce à une coopération étroite entre l’Université de Toulouse, la Région Occitanie et l’Union européenne, ce projet illustre notre engagement collectif en faveur de l’excellence scientifique et de l’innovation », a souligné Hugo Sobral, directeur général adjoint à la Commission européenne, rappelant la contribution du FEDER à hauteur de 3 millions d’euros.
Mais cette inauguration ne vaut pas seulement comme un aboutissement. Elle s’inscrit dans une histoire scientifique plus que centenaire. L’observatoire du Pic du Midi trouve son origine en 1873, lorsque Charles du Bois de Nansouty et Célestin-Xavier Vaussenat conçoivent une station météorologique sur les pentes du Bigorre. Le véritable observatoire voit le jour en 1882, à une époque où la conquête scientifique du ciel se mêle encore à l’exploration géographique. Très vite, la pureté de son atmosphère en fait un haut lieu de l’astronomie.
Au XXᵉ siècle, le Pic du Midi s’impose comme un laboratoire de référence. Dès 1907, il abrite l’un des plus grands télescopes d’Europe. Dans les années 1930, Bernard Lyot y met au point le coronographe, outil révolutionnaire pour l’étude de la couronne solaire. Trois décennies plus tard, le site contribue à la cartographie lunaire commandée par la NASA pour préparer les missions Apollo : plus de 60 000 photographies de la Lune y sont réalisées avec un télescope de 1,06 mètre installé en 1963.
Aujourd’hui, le Pic du Midi conjugue recherche, observation et valorisation du patrimoine scientifique. Labellisé Réserve internationale de ciel étoilé, il demeure un observatoire unique où science et territoire se répondent. L’inauguration de 2025, deux jours seulement après la dernière audition de sa candidature à l’UNESCO, prolonge cette ambition : faire reconnaître la science comme valeur universelle et inscrire le sommet pyrénéen dans le patrimoine mondial de l’humanité.
À travers ces nouveaux bâtiments, le Pic du Midi confirme sa double vocation : vigie du climat et fenêtre sur l’univers. Un lieu où l’exigence scientifique, la mémoire des pionniers et la beauté du ciel se rencontrent dans un même souffle.

