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Baromètre L’Étudiant : 83 % des jeunes accordent leur confiance aux médias traditionnels

  Selon le baromètre publié par L’Étudiant à l’occasion de son Salon du journalisme, marketing et communication, 85 % des 15-20 ans voient dans le journalisme un métier d’utilité sociale. Mais ils pointent aussi les réseaux sociaux et l’intelligence artificielle comme les principaux vecteurs de désinformation. Le journalisme conserve, aux yeux des 15-20 ans, une valeur essentielle : celle de servir l’intérêt collectif. Tel est l’un des enseignements majeurs du baromètre publié par le magazine L’Étudiant à l’occasion de son Salon du journalisme, marketing et communication, organisé le 8 novembre prochain au Newcap Event Center à Paris. Pour 85 % des jeunes interrogés, le métier de journaliste remplit une fonction d’utilité sociale en informant et en sensibilisant. Mais cette reconnaissance ne va pas sans ambivalence : 23 % regrettent qu’il soit peu valorisé, et 58 % jugent que son influence s’est affaiblie face à la vitesse de circulation des contenus...

Le cas Yuka : quand l’information sur les aliments convoque confiance, « empowerment » et gouvernance algorithmique

 

Yuka

Par Jean-Loup Richet, IAE Paris – Sorbonne Business School; Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne; Béatrice Parguel, Université Paris Dauphine – PSL; Camille Cornudet, Université Paris Nanterre; Fabienne Berger-Remy, Université Paris Dauphine – PSL et Marie-Ève Laporte, Université Paris-Saclay

Portées par la popularité de Yuka ou d’Open Food Facts, les applications de scan alimentaire connaissent un réel engouement. Une étude analyse les ressorts du succès de ces outils numériques qui fournissent des informations nutritionnelles perçues comme plus indépendantes que celles présentes sur les emballages et délivrées soit par les pouvoirs publics (par exemple, l’échelle Nutri-Score) soit par les marques.


La confiance du public envers les autorités et les grands industriels de l’alimentaire s’érode, et un phénomène en témoigne : le succès fulgurant des applications de scan alimentaire. Ces outils numériques, tels que Yuka ou Open Food Facts, proposent une alternative aux étiquettes nutritionnelles officielles en évaluant les produits au moyen de données collaboratives ouvertes ; elles sont ainsi perçues comme plus indépendantes que les systèmes officiels.

Preuve de leur succès, on apprend à l’automne 2025 que l’application Yuka (créée en France en 2017, ndlr) est désormais plébiscitée aussi aux États-Unis. Robert Francis Kennedy Jr, le ministre de la santé de l’administration Trump, en serait un utilisateur revendiqué.

Une enquête autour des sources d’information nutritionnelle

La source de l’information apparaît essentielle à l’ère de la méfiance. C’est ce que confirme notre enquête publiée dans Psychology & Marketing. Dans une première phase exploratoire, 86 personnes ont été interrogées autour de leurs usages d’applications de scan alimentaire, ce qui nous a permis de confirmer l’engouement pour l’appli Yuka.

Nous avons ensuite mené une analyse quantitative du contenu de plus de 16 000 avis en ligne concernant spécifiquement Yuka et, enfin, mesuré l’effet de deux types de signaux nutritionnels (soit apposés sur le devant des emballages type Nutri-Score, soit obtenus à l’aide d’une application de scan des aliments comme Yuka).

Les résultats de notre enquête révèlent que 77 % des participants associent les labels nutritionnels officiels (comme le Nutri-Score) aux grands acteurs de l’industrie agroalimentaire, tandis qu’ils ne sont que 27 % à percevoir les applis de scan comme émanant de ces dominants.

À noter que cette perception peut être éloignée de la réalité. Le Nutri-Score, par exemple, n’est pas affilié aux marques de la grande distribution. Il a été développé par le ministère français de la santé qui s’est appuyé sur les travaux d’une équipe de recherche publique ainsi que sur l’expertise de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et du Haut Conseil de la santé publique (HCSP).

C’est quoi, le Nutri-Score ?

  • Le Nutri-Score est un logo apposé, sur la base du volontariat, sur l’emballage de produits alimentaires pour informer le consommateur sur leur qualité nutritionnelle.
  • L’évaluation s’appuie sur une échelle de cinq couleurs allant du vert foncé au orange foncé. Chaque couleur est associée à une lettre, de A à E.
  • La note est attribuée en fonction des nutriments et aliments à favoriser dans le produit pour leurs qualités nutritionnelles (fibres, protéines, fruits, légumes, légumes secs) et de ceux à éviter (énergie, acides gras saturés, sucres, sel et édulcorants pour les boissons).

De son côté, la base de données Open Food Facts (créée en France en 2012, ndlr) apparaît comme un projet collaboratif avec, aux manettes, une association à but non lucratif. Quant à l’application Yuka, elle a été créée par une start-up.

Des applis nutritionnelles perçues comme plus indépendantes

Ces applications sont vues comme liées à de plus petites entités qui, de ce fait, apparaissent comme plus indépendantes. Cette différence de perception de la source engendre un véritable fossé de confiance entre les deux types de signaux. Les consommateurs les plus défiants se montrent plus enclins à se fier à une application indépendante qu’à une étiquette apposée par l’industrie ou par le gouvernement (Nutri-Score), accordant ainsi un avantage de confiance aux premières.

Ce phénomène, comparable à un effet « David contre Goliath », illustre la manière dont la défiance envers, à la fois, les autorités publiques et les grandes entreprises alimente le succès de solutions perçues comme plus neutres. Plus largement, dans un climat où rumeurs et désinformation prospèrent, beaucoup préfèrent la transparence perçue d’une application citoyenne aux communications officielles.

Dimension participative et « volet militant »

Outre la question de la confiance, l’attrait des applications de scan tient aussi à l’empowerment ou empouvoirement (autonomisation) qu’elles procurent aux utilisateurs. L’empowerment du consommateur se traduit par un sentiment accru de contrôle, une meilleure compréhension de son environnement et une participation plus active aux décisions. En scannant un produit pour obtenir instantanément une évaluation, le citoyen reprend la main sur son alimentation au lieu de subir passivement l’information fournie par le fabricant.

Cette dimension participative a même un volet qui apparaît militant : Yuka, par exemple, est souvent présentée comme l’arme du « petit consommateur » contre le « géant agro-industriel ». Ce faisant, les applications de scan contribuent à autonomiser les consommateurs qui peuvent ainsi défier les messages marketing et exiger des comptes sur la qualité des produits.

Des questions de gouvernance algorithmique

Néanmoins, cet empowerment s’accompagne de nouvelles questions de gouvernance algorithmique. En effet, le pouvoir d’évaluer les produits bascule des acteurs traditionnels vers ces plateformes et leurs algorithmes. Qui définit les critères du score nutritionnel ? Quelle transparence sur la méthode de calcul ? Ces applications concentrent un pouvoir informationnel grandissant : elles peuvent, d’un simple score, influer sur l’image d’une marque, notamment celles à la notoriété modeste qui ne peuvent contrer une mauvaise note nutritionnelle.

Garantir la sécurité et l’intégrité de l’information qu’elles fournissent devient dès lors un enjeu essentiel. À mesure que le public place sa confiance dans ces nouveaux outils, il importe de s’assurer que leurs algorithmes restent fiables, impartiaux et responsables. Faute de quoi, l’espoir d’une consommation mieux informée pourrait être trahi par un excès de pouvoir technologique non contrôlé.

À titre d’exemple, l’algorithme sur lequel s’appuie le Nutri-Score est réévalué en fonction de l’avancée des connaissances sur l’effet sanitaire de certains nutriments et ce, en toute transparence. En mars 2025, une nouvelle version de cet algorithme Nutri-Score est ainsi entrée en vigueur.

La montée en puissance des applications de scan alimentaire est le reflet d’une perte de confiance envers les institutions, mais aussi d’une aspiration à une information plus transparente et participative. Loin d’être de simples gadgets, ces applis peuvent servir de complément utile aux politiques de santé publique (et non s’y substituer !) pour reconstruire la confiance avec le consommateur.

En redonnant du pouvoir au citoyen tout en encadrant rigoureusement la fiabilité des algorithmes, il est possible de conjuguer innovation numérique et intérêt général. Réconcilier information indépendante et gouvernance responsable jouera un rôle clé pour que, demain, confiance et choix éclairés aillent de pair.The Conversation

Jean-Loup Richet, Maître de conférences et co-directeur de la Chaire Risques, IAE Paris – Sorbonne Business School; Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne; Béatrice Parguel, Chargée de recherche CNRS, Université Paris Dauphine – PSL; Camille Cornudet, Maître de conférence, Université Paris Nanterre; Fabienne Berger-Remy, Maîtresse de conférences HDR en sciences de gestion, Université Paris Dauphine – PSL et Marie-Ève Laporte, Professeure en sciences de gestion, Université Paris-Saclay

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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