Accéder au contenu principal

Web immersif : et si nous ressentions Internet ?

Par  Ahmed Azough , Pôle Léonard de Vinci Si, aujourd’hui, nous sommes habitués à surfer sur Internet, partie émergée d’un énorme iceberg de données interconnectées, les évolutions technologiques récentes devraient bientôt nous permettre de nous immerger dans cet océan bouillonnant de big data. L’immersion vise à procurer à l’utilisateur un sentiment de présence en utilisant des technologies de captation et restitution sensorielle : l’utilisateur se sent transporté dans l’environnement digital créé par des technologies numériques, à tel point qu’ il ressent ces objets numériques virtuels comme faisant partie de sa réalité . De leur côté, les systèmes numériques détectent et interprètent de mieux en mieux les comportements et les émotions de leurs interlocuteurs , à tel point que l’humain a l’impression que ce système est conscient de sa présence et interagit volontairement. Les films Matrix et plus récemment Ready Player One reflètent bien cette idée : s’interposer entre

Le Covid-19 sonnera-t-il le glas du travail tel que nous le connaissons ?

La présence physique au travail restera-t-elle autant assimilée à de la fiabilité qu'avant la crise sanitaire ? Fizkes / Shutterstock


Par Emmanuelle Léon, ESCP Business School


Pas une semaine ne se passe sans que les médias ne prédisent la disparition des open spaces : « Covid-19 : l’open space va-t-il (enfin) disparaître ? » (Usbek et Rica, le 7 mai) ; « Haro sur les open spaces, ruée sur le plexiglas… le bureau à l’heure du Covid-19 » (Le Monde, le 1er mai) ; « Voici pourquoi le Covid-10 va tuer les open spaces » (le JDD, le 27 avril). Faut-il en conclure que la crise sanitaire sera l’occasion d’éliminer définitivement ces espaces de travail décriés depuis fort longtemps ?
Or, la véritable interrogation semble être d’un autre ordre. La question n’est pas de savoir si l’open space va survivre ou disparaître : la question est de savoir si cette crise va nous donner – ou pas – une occasion unique de réinterroger notre rapport à l’espace et au temps de travail, de repenser nos organisations et nos manières de travailler.
Nous pouvons identifier cinq transformations essentielles dans notre rapport à l’espace, au travail et au management.

La présence remise en question

D’une certaine manière, la crise du Covid-19 aura fait évoluer les référentiels dans nombre d’entreprises. Le monde industriel, dont l’entité emblématique est l’usine, s’est construit sur le respect du temps passé dans un lieu. Unité de temps, unité de lieu et unité d’action (la chaîne de montage) sont restées pour beaucoup les référentiels du « travail ». Ceci explique en partie les réticences à adopter le télétravail car, si un salarié échappe au temps et au lieu, il échappe, peu ou prou, à la discipline salariale.
Les chercheurs Kimberly Elsbach et Daniel Cable démontrent que la présence physique au travail est encore assimilée à de la fiabilité, et que la présence au-delà des heures de travail est perçue comme un signe d’engagement. Il est grand temps de distinguer présence et travail ! Le fait d’être à distance n’aura pas empêché nombre de salariés d’être productifs. Et tout un chacun sait que le fait d’être physiquement au bureau n’est pas toujours synonyme de travail et d’efficacité…

Unité de temps, unité de lieu et unité d’action sont restées pour beaucoup les référentiels du « travail ». Mike Dotta/Shutterstock

La crise aura été, de ce point de vue là, un formidable accélérateur de la transformation vers le monde post-industriel, où les référentiels de temps et d’espace de travail sont à réinventer.

Un télétravail décomplexé

Nous venons de vivre une période étrange, où nous sommes tous devenus, en l’espace de 24h, des télétravailleurs à temps complet. Peut-on vraiment parler de télétravail d’ailleurs ? Il me semble qu’il s’agit davantage de la poursuite de l’activité à distance, car on est bien loin de projets de télétravail prévus, organisés et pilotés !
Pour autant, au fil des semaines, chacun a trouvé des ressources pour travailler à distance. Bien évidemment, être éloigné à temps complet de son lieu de travail, de sa hiérarchie et de ses collègues n’est pas bénéfique à long terme et les recherches sur le télétravail prônent de limiter ce dernier à deux ou trois jours semaine, pour éviter les risques d’isolement et maintenir la cohésion au sein des équipes.
Il n’empêche que c’est sous la contrainte que s’opèrent le plus rapidement des changements aussi fondamentaux. Réaliser un véritable retour d’expérience sur ce travail à distance imposé, subi, à temps complet, est une belle opportunité pour construire les fondations d’un télétravail efficace à l’avenir.

Une mise à distance du management

Le travail à distance a eu pour corollaire le développement du management à distance. Longtemps réservé à certains niveaux hiérarchiques ou à certaines fonctions, ce dernier a été expérimenté par tous ceux qui avaient des équipes à gérer. Cependant, le management à distance exige des compétences spécifiques.
La distance ne tolère pas l’improvisation, la distance ne laisse que peu de place au charisme, la distance exige des postures adaptées de la part des managers pour éviter que le management à distance ne se transforme en mise à distance du management. Imaginer que l’on peut faire à distance la même chose qu’à proximité, essayer coûte que coûte de reproduire la même organisation, le même nombre de réunions, le même type de reporting que dans un contexte de proximité est autant de pièges à éviter.
Aujourd’hui, la question qui va se poser aux managers est d’utiliser cette expérience pour embrasser et améliorer le télétravail au sein de leurs équipes. Il faut se saisir de cette expérience pour définir les normes de comportements (en présentiel et à distance), les modes de communication, le reporting, etc.
Cette crise aura permis à tous d’expérimenter le management à distance : espérons qu’elle aura aussi facilité l’identification des facteurs clés de succès, notamment en ce qui concerne les notions de confiance et de contrôle.

Une segmentation différente des espaces

Alors que l’open space visait à lisser les différences puisque tout le monde était logé à la même enseigne quelle que soit son statut, la nature de son activité, ou la taille de son équipe la crise a mis en exergue la nécessité de segmenter davantage les populations et leurs besoins en matière d’espaces de travail. Cette tendance, qui émergeait déjà dans certains projets immobiliers, va être accentuée par l’impossibilité de ramener tout le monde au bureau en même temps.
Il va falloir faire des choix, il va falloir évaluer les risques, et identifier quels sont les points de rassemblement critiques, pour quelles équipes, de quelle manière. En cela, la crise va nous conduire à repenser les espaces non pas uniquement en fonction des situations de travail (trop individuelles, trop fluctuantes) mais probablement en fonction des activités qui s’y opèrent, et ce au niveau des collectifs de travails.
Réflexion d’autant plus cruciale que nombre de salariés comprendraient mal, dans un tel contexte, qu’on leur impose de venir au bureau, pour y réaliser un travail qu’ils auraient pu faire en toute sécurité depuis leur domicile. Le télétravail deviendra-t-il de ce point de vue là la norme et le bureau l’exception ? C’est l’hypothèse posée par le constructeur automobile PSA, qui en a décidé ainsi début mai.

Réinventer la notion d’intimité

La crise que nous venons de vivre a mis à mal la segmentation entre vie privée et vie professionnelle. Volontairement ou pas, nos collègues, nos managers ont eu accès à nos domiciles, même virtuellement. Nos logements se sont parfois retrouvés transformés en open spaces, pour peu que conjoints et enfants aient dû y travailler également. Or l’être humain a besoin d’intimité acoustique, verbale et visuelle, comme le soulignent les psychologues de l’environnement.
Par intimité acoustique, il faut entendre le fait de pouvoir travailler dans un niveau de bruit acceptable (ni trop faible, ni trop élevé). L’open space était souvent jugé soit trop bruyant, empêchant toute concentration, soit trop silencieux, et générateur d’angoisse… L’intimité verbale consiste à pouvoir s’exprimer sur des sujets confidentiels sans être entendu par les autres. Et l’intimité visuelle consiste à pouvoir réaliser des tâches sans être vu.
L’open space avait mis à mal ces besoins d’intimité mais ces derniers sont également présents dans le cadre du travail à domicile. Et ce besoin d’intimité ne se limite pas à l’environnement physique : il est également présent dans le monde digital où nous évoluons.
Réfléchir à ces différentes questions et identifier des solutions acceptables par le corps social feront partie des défis à relever. Alors, et seulement alors, sera-t-il possible de statuer sur l’avenir des open spaces…The Conversation

Emmanuelle Léon, Professeur asssocié, Directrice scientifique de la Chaire Reinventing Work, ESCP Business School
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

Posts les plus consultés de ce blog

Le bipeur des années 80 plus efficace que le smartphone ?

Par André Spicer, professeur en comportement organisationnel à la Cass Business School (City University of London) : Vous vous souvenez des bipeurs ? Ces appareils étaient utilisés largement avant l'arrivée massive des téléphones portables et des SMS. Si vous aviez un bipeur, vous pouviez recevoir des messages simples, mais vous ne pouviez pas répondre. Un des rares endroits où on peut encore en trouver aujourd’hui sont les hôpitaux. Le Service National de Santé au Royaume-Uni (National Health Service) en utilise plus de 130 000. Cela représente environ 10 % du nombre total de bipeurs présents dans le monde. Une récente enquête menée au sein des hôpitaux américains a révélé que malgré la disponibilité de nombreuses solutions de rechange, les bipeurs demeurent le moyen de communication le plus couramment utilisée par les médecins américains. La fin du bipeur dans les hôpitaux britanniques ? Néanmoins, les jours du bipeur dans les hôpitaux britanniques pourraient être compté

Univers parallèles et mondes virtuels : la guerre des métavers est commencée

  Une partie de poker dans le métavers (capture d'écran de la vidéo “Le métavers et comment nous allons le construire ensemble” sur YouTube) Par  Oihab Allal-Chérif , Neoma Business School Le 17 octobre 2021, Mark Zuckerberg a lancé les hostilités de manière assez théâtrale, comme s’il défiait ses concurrents d’en faire autant. Afin de concrétiser son rêve d’enfant, le métavers, il a décidé de mettre en œuvre des moyens colossaux : 10 000 ingénieurs hautement qualifiés seront recrutés en Europe dans les 5 prochaines années. Cette annonce a été faite quelques jours avant celle du changement de nom du groupe Facebook en Meta , le 28 octobre, démontrant ainsi l’engagement total du fournisseur de réseaux sociaux dans la transition vers le métavers. Le 22 juillet 2021, dans une interview à The Verge , le créateur de Facebook racontait : « Je pense à certains de ces trucs depuis le collège quand je commençais tout juste à coder. […] J’écrivais du code

Midi-Pyrénées l’eldorado des start-up

Le mouvement était diffus, parfois désorganisé, en tout cas en ordre dispersé et avec une visibilité et une lisibilité insuffisantes. Nombreux sont ceux pourtant qui, depuis plusieurs années maintenant, ont pressenti le développement d’une économie numérique innovante et ambitieuse dans la région. Mais cette année 2014 pourrait bien être la bonne et consacrer Toulouse et sa région comme un eldorado pour les start-up. S’il fallait une preuve de ce décollage, deux actualités récentes viennent de l’apporter. La première est l’arrivée à la tête du conseil de surveillance de la start-up toulousaine Sigfox , spécialisée dans le secteur en plein boom de l’internet des objets, d’Anne Lauvergeon, l’ancien sherpa du Président Mitterrand. Que l’ex-patronne du géant Areva qui aurait pu prétendre à la direction de grandes entreprises bien installées, choisisse de soutenir l’entreprise prometteuse de Ludovic Le Moan , en dit long sur le changement d’état d’esprit des élites économiques du pay

La fin des cookies tiers ne répond pas au besoin de contrôle des internautes sur leurs données

Pour le moment, la plupart des solutions alternatives aux cookies privilégient l’objectif commercial aux dépens des attentes des internautes. Piqsels , CC BY-SA Par  Carlos Raúl Sánchez Sánchez , Montpellier Business School – UGEI ; Audrey Portes , Montpellier Business School – UGEI et Steffie Gallin , Montpellier Business School – UGEI Les révélations du Wall Street Journal contenues dans les « Facebook Files » , publiés en septembre dernier, ont une nouvelle fois montré que les utilisateurs s’exposaient à des risques liés à la divulgation des informations personnelles. Les réseaux sociaux ne sont pas les seuls en cause : les nombreux data breach (incidents de sécurité en termes de données confidentielles) rendus publics, illustrent régulièrement la vulnérabilité des individus face à une navigation quotidienne sur les moteurs de recherche, sites de e-commerce et autres ayant recours à des « cookies tiers » , ces fichiers de données envoyés par

ChatGPT et cybersécurité : quels risques pour les entreprises ?

Analyse de Proofpoint Les plateformes de génération de texte tel que ChatGPT permettent de créer du contenu de qualité, instantanément, gratuitement, et sur n’importe quel sujet. Comme le confirme le lancement de Bard par Google, nous sommes désormais entrés dans une course à l’IA, ou chaque géant du web cherche à posséder la meilleure solution possible. Si l’avancée technologique est majeure, le risque notamment pour la cybersécurité des entreprises est indéniable. Comment lutter contre des campagnes de phishing de plus en plus ciblées et sophistiquées, maintenant alimentées par des technologies capables de parfaire encore plus la forme et la teneur d’un email malveillant ? En quelques mots, ChatGPT offre une ingénierie sociale très performante, mais une automatisation encore limitée. Concernant la détection de la menace par rançongiciels, comme l’explique Loïc Guézo, Directeur de la stratégie Cybersécurité chez Proofpoint, « Bien que les chatbots puissent générer du texte pour le cor

Décryptage de l'attaque par ransomware du Centre Hospitalier de Versailles

  Par Cassie Leroux, Directrice Produit chez Mailinblack Après l’hôpital de Corbeilles Essonnes, c’est au tour de l'établissement hospitalier de Versailles, situé au Chesnay-Rocquencourt (Yvelines), d’être visé depuis samedi soir par une cyberattaque. Comment s’est-elle déroulée, quelles conséquences pour ses patients, et aurait-elle pû être évitée ? Décryptage de Cassie Leroux, Directrice Produit chez Mailinblack. Que savons-nous de cette attaque ? Cette cyberattaque vise l’ensemble de l'établissement, dont l'hôpital André-Mignot, la maison de retraite Despagne et l'hôpital Richaud à Versailles. L’hôpital continue de fonctionner, mais au ralenti ce lundi, ce qui perturbe sérieusement son activité. Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire pour tentative d'extorsion.  Cette cyberattaque est de type Ransomware, un logiciel malveillant qui bloque l’accès à aux outils informatiques et aux données en les chiffrant. Dans ce type d’attaque, le hacker demande g