Il y a dix ans, en février 2013, le gouvernement Ayrault lançait le plan France Très Haut Débit qui succédait au programme national très haut débit lancé en 2010. Dans un discours prononcé le 20 février 2013, François Hollande avait ainsi annoncé la mobilisation de 20 milliards d’euros dans les dix prochaines années pour développer l’accès au très haut débit pour tous, dont environ 3 milliards d’euros de subvention apportés par l’État pour soutenir les projets des collectivités territoriales. L’objectif était ambitieux avec un accès rapide à large bande pour tous les ménages d’ici 2022 (couverture à 100 % avec 30 Mb/s) et de fibre pour tous d’ici 2025.
Tenir la promesse de 100 % de très haut débit d’ici 2025
Depuis les opérateurs ont mis les bouches doubles, investissant massivement dans le déploiement de la fibre, mais aussi des réseaux mobiles 4G et 5G. « La connectivité numérique s’est améliorée en France, notamment par de nombreuses mises à niveau des réseaux fixes du pays et par la poursuite de la mise en œuvre du Plan France très haut débit, avec une adoption remarquable de 1 Gb/s dans l’ensemble du pays et une très large disponibilité du haut débit mobile (couverture 4G de 99 % des ménages) », félicitait la Commission européenne. « Toutefois, le rythme du déploiement de la fibre jusqu’au foyer (FTTH) s’est ralenti dans certaines régions, y compris dans les zones très densément peuplées », observait la Commission.
C’est que l’objectif de 100 % de la population connectée au très haut débit paraît, en effet, difficilement atteignable en raison du relief de certains de nos territoires, notamment en Occitanie. Ces zones blanches ou grises ne sont toutefois pas condamnées à être coupées d’une connexion rapide à internet : une liaison satellite pourrait y remédier, même si le débit est beaucoup plus bas que la fibre ou la 4G/5G (mais il s’améliore).
Autrefois très onéreuse et complexe à mettre en œuvre pour le grand public, la connexion à internet par satellite est désormais beaucoup plus accessible et donne même lieu à une concurrence entre opérateurs, ce qui est une bonne chose pour tous ceux qui vivent avec une connexion ADSL trop lente pour les usages d’aujourd’hui.
Parmi les acteurs qui changent la donne on retrouve Elon Musk, le fantasque patron de Tesla, Space X ou du réseau social X (ex-Twitter). Ce dernier est aussi à la tête de Starlink, un fournisseur d’accès à internet mondial créé en 2018 qui s’appuie aujourd’hui sur une constellation de quelque 12 000 petits satellites en orbite basse (550 km d’altitude contre 36 000 km pour un satellite géostationnaire), 42 000 à terme. Autant dire que la totalité de la surface de la planète sera couverte. Au début de l’invasion de l’Ukraine, la fourniture par Musk de kits de connexion Starlink a ainsi été déterminante pour assurer la connexion internet et donc conforter la résistance ukrainienne.
L’internet par satellite, marché en pleine expansion
Aujourd’hui, Starlink passe à l’offensive commerciale pour le grand public. Depuis plusieurs jours, il a lancé une offre promotionnelle. « Le prix pour l’abonnement en France métropolitaine est réduit de 20 % indéfiniment à 40 €/mois pour une connexion internet haut débit, à faible latence, même dans les lieux les plus reculés et ruraux. » Le prix du kit (antenne + routeur) est passé de 450 € à 199 €, indique la société, qui promet à ses clients de pouvoir enfin bénéficier de la vidéo à la demande en 4K, de pouvoir faire de la visioconférence ou jouer en ligne.
Sur ce créneau, Starlink n’est pas le seul. L’internet par satellite fait l’objet d’une intense bataille entre plusieurs concurrents. Et pour cause. En 2021, le marché mondial était estimé à 3,985 milliards de dollars ; d’ici 2030, il devrait atteindre 17,431 milliards de dollars, selon le rapport « Satellite Internet Market Share, Analysis report and Region Forecast 2022-2030 ». Autant dire qu’il suscite des convoitises...
Les opérateurs télécoms traditionnels sont sur les rangs, comme Orange, Eutelsat qui a fusionné avec la société britannique OneWeb (qui dispose d’une flotte de satellites en orbite basse comme Starlink), mais aussi les géants du Net Amazon (avec sa constellation Kuiper) ou Meta-Facebook (avec son projet Athena).
Derrière la bataille contre les zones blanches, la guerre de l’internet par satellite a déjà commencé.
(Article publié dans. La Dépêche du Midi du 4 août 2023)