L’élection présidentielle française de 2022 peut-elle échapper aux tentatives d’intrusions étrangères venues de Russie, de Chine ou d’ailleurs et/ou de manipulation de l’information ? Entre fake news et théories complotistes sans compte r des cyberattaques comme celle subies en 2017 par les équipes d’Emmanuel Macron, cette question est devenue cruciale à désormais dix mois de l’élection suprême. "La démocratie des crédules a pris le pouvoir dans certains pays, et notamment aux Etats-Unis sous la présidence de Donald Trump", analysait récemment dans l’Express le sociologue Gérald Bronner. Ce sont notamment les Deepfake qui inquiètent le plus l’exécutif. Les Deepfake ce sont des vidéos truquées où, grâce à l’intelligence artificielle, on peut plaquer des images (visages, lèvres) sur une personne pour lui faire dire tout et n’importe quoi. C’est cette technique qu’utilise l’imitateur Nicolas Canteloup. Il se dit que Brigitte Macron se serait laissée tromper tant le résultat est bluffant de vérité. On imagine ce qu’un tel dispositif pourrait produire durant une campagne d’autant qu’il devient de plus en plus facile et peu cher à utiliser…
Préserver les élections
Un proche d’Emmanuel Macron s’inquiétait aussi très récemment de la façon dont les réseaux sociaux organisent la modération des messages qu’ils hébergent. Afin de préserver le scrutin de ces menaces numériques, le gouvernement va créer une agence de lutte les manipulations de l’information en provenance de l’étranger visant à "déstabiliser l’Etat". L’annonce a été faite mercredi par le Secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), Stéphane Bouillon. Cette agence devrait voir le jour dès le mois de septembre et mobiliser à terme jusqu’à 60 personnes qui travailleront en sources ouvertes, c’est-à-dire à partir d’éléments publics, a-t-il précisé au cours d’une audition devant la Commission défense à l’Assemblée nationale. "Il ne s’agit pas de corriger ou rétablir la vérité, mais d’arriver à détecter les attaques quand elles viennent de l’étranger, pouvoir les caractériser et d’une certaine manière les attribuer pour pouvoir permettre aux hommes politiques, aux diplomates, à la justice et la presse de constater que sur 400 000 tweets de reprise de telle ou telle information, 200 000 viennent d’une ferme à bots (des comptes automatisés, ndlr) dans une région hors de notre pays ou que tel débat provient d’une ferme à trolls", a expliqué M. Bouillon.
"Il ne s’agit pas de faire du renseignement, ce qui nous intéresse c’est ce qui est en train de devenir pandémique sur le plan informationnel" et si cela émane d’"un pays étranger ou d’une organisation étrangère qui visent ainsi à déstabiliser l’Etat sur le plan politique", a-t-il insisté. En 2019, lors des élections européennes, Microsoft avait détecté une série d’attaques visant une centaine d’employés de plusieurs "think tanks" en Allemagne, France, Belgique, Pologne, Roumanie et Serbie.
Conscient du risque que cette nouvelle agence passe pour un outil d’influence en ligne au service de l’exécutif français à un an de la présidentielle, le SGDSN promet la "transparence totale" sur ses actions. Un comité d’éthique et scientifique doit chapeauter l’agence. D’autres pays ou groupes d’Etats se sont d’ores et déjà dotés de telles structures. L’Union européenne a créé en 2015 "East Strat Comm", spécifiquement consacrée à lutter contre les manipulations en provenance de Russie.