L’appareil photo n’est pas mort, il a changé de forme. Longtemps compagnon de voyage ou de moments familiaux, le boîtier numérique classique s’est effacé sans bruit devant un rival inattendu : le téléphone portable. En une décennie, les usages se sont inversés et selon les dernières données de Photutorial, plus de 92 % des photographies prises en 2025 le sont avec un smartphone, contre à peine 7 % pour les appareils dédiés.
Autrefois emblème de la maîtrise technique, l’appareil photo grand public n’est plus que l’ombre de lui-même et les ventes s’effondrent. Mais la photographie, elle, reste.
C’est dans ce paysage transformé que s’inscrit l’ouvrage "Smart Photos" de Jo Bradford, publié aux éditions Eyrolles. Photographe de formation, militante de l’image populaire, l’autrice britannique entend répondre à un besoin clair : redonner du sens et de la méthode à ce geste devenu universel — prendre une photo avec son téléphone. La photographe entend expliquer les potentialités du nouvel outil omniprésent, souvent sous-estimé et parfois mal utilisé.
Un manuel exigeant pour un outil devenu banal
Le projet de Jo Bradford n’est ni techniciste, ni élitiste mais repose sur la conviction simple que la qualité d’une photographie ne dépend pas du matériel, mais du regard. À rebours des manuels de photographie mobile empilant astuces et effets, "Smart Photos" propose une grammaire des bons gestes. Il s’agit moins de "faire de belles images" que de comprendre pourquoi certaines fonctionnent, comment les cadrer, les éclairer, les composer.
Jo Bradford aborde ainsi les règles fondamentales de la composition, la gestion de la lumière, la dynamique des lignes, le rôle des couleurs. Elle invite à regarder avant de déclencher, à penser la scène plutôt qu’à la capturer à la volée. Pas évident… À l’appui de son propos, le livre propose des visuels inspirants, des conseils concrets et une structure accessible sans être simpliste.
Eloge de la lenteur
Le livre s’adresse à un large public : voyageurs, créateurs de contenu, journalistes, enseignants, amateurs curieux. À l’heure où chaque jour voit défiler plus de 5 milliards d’images sur nos écrans, Jo Bradford plaide pour une photographie plus lente, plus pensée, plus juste.
Elle n’ignore pas la puissance des réseaux, ni la dimension virale de l’image mobile, mais elle refuse d’y voir une fatalité et estime au contraire que le smartphone peut devenir un instrument de narration, de documentation, d’expression personnelle.